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Résultat du sondage :

Encore un krach sur les marchés actions…


L'occasion de renforcer sur les valeurs de qualité

65% - 1097
J'attends le rebond, je revends tt et fini la bourse

2% - 35
Je suis liquide, je suis serein

12% - 202
BX4 depuis les 3800 sur le CAC, je suis riche

2% - 42
Je suis en vacances, je ne vois pas le crack

3% - 65
A fond sur les valeurs de Rdt, miam, miam

14% - 242

[+10]    #1 20/08/2018 01h16

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@Elessor : votre question est très pertinente. Effectivement, une mesure de marché du risque comme un CDS peut être affectée par un sentiment général de sous-estimation du risque. C’était le cas par exemple pour les banques US et européennes avant 2007 : leurs CDS 5 ans étaient tombés à 8-9 points de base - avant de monter à 200-400 points de base pendant la crise (maintenant : autour 30 points de base pour les meilleures banques).

Cela dit, il faut nuancer ce risque par l’hétérogénéité des marchés financiers :

1) Hétérogénéité du pricing des différents risques : à un même instant, certains risques peuvent être beaucoup mieux pricés que d’autres. Je fais l’hypothèse que les risques bancaires sont mieux connus, donc mieux pricés, depuis la dernière crise. Un même marché peut comprendre des "poches" d’optimisme (par exemple sur le secteur techno, en ce moment, à mon avis) et des secteurs où les risques sont mieux pricés (par exemple, secteurs cycliques, REIT et banques, en ce moment ?). Ce qui caractérise une bulle, c’est une sous-estimation généralisée (ou même une ignorance) des risques ; je ne pense pas qu’on soit en bulle actuellement, mais qu’il y a des poches, des secteurs où les prévisions sont trop optimistes et les risques sous-estimés.

2) Hétérogénéité des segments et des instruments de marché : Un même risque peut être pricé différemment sur le marché actions, sur le marché obligataire, et sur le marché des CDS. D’une part, parce que ces instruments financiers sont différents les uns des autres (ils reflètent les risques de façon plus ou moins "pure"), et d’autre part parce que ces segments de marché, bien que liés (arbitrages etc.), sont différents, et ne reflètent pas l’information à la même vitesse. Pendant une crise comme 2007-2008, on a pu voir le sentiment de risque se propager progressivement à travers tous les segments de marché : ce n’était pas immédiat, mais progressif. (J’avais construit pour mon employeur un "baromètre" de marché montrant la propagation du risque au fil du temps ; j’essaierai d’en refaire un pour la prochaine crise, même si je n’ai plus accès à Bloomberg pour les mises à jour automatiques.)

3) Hétérogénéité des participants de marché : le marché actions, le marché obligataire et le marché des CDS sont dominés par des participants de marché différents, dont la réactivité et la compétence pour évaluer les risques est variable :

- Le marché actions est sans doute le plus enclin à des mouvements grégaires, pas simplement à cause des petits porteurs (minoritaires) mais aussi des institutionnels (pseudo gestion active, peur de se distinguer des concurrents, effets de mode etc.).

- Le marché obligataire est davantage dominé par des institutionnels buy and hold pépères (du type assureurs) mais est occasionnellement sujet à des mouvements de panique.

- Le marché des CDS est dominé par des professionnels de la couverture des risques : leur métier est de couvrir des risques, pas de battre des benchmarks. Ils sont donc généralement compétents pour apprécier les risques, et très réactifs (un nouveau risque apparaît souvent d’abord sur les CDS, puis sur les actions / obligations). Sur les banques, mon expérience est que le marché des CDS est à peu près aussi compétent pour évaluer les risques que les superviseurs (alors que ces derniers ont beaucoup d’informations confidentielles). C’est donc mon marché préféré pour évaluer les risques de crédit sur un souverain ou une entreprise - même s’il n’est pas immune à des phases de sous-évaluation des risques comme tous les autres segments de marchés.

@Bergamote :

1) Un CDS, assurance contre le défaut d’un émetteur d’obligations, est un produit beaucoup plus "pur" qu’une action ou une obligation, qui sont pour moi des produits "complexes". Une multitude de facteurs endogènes et exogènes à l’entreprise influent sur le cours de son action ou d’une de ses obligations :

- Le pricing de l’action dépend (en partant de l’approche des DCF comme cadre conceptuel) des perspectives de profit de l’entreprise, du taux sans risque (variable exogène), de la prime de risque sectorielle (exogène), de la prime de risque spécifique à l’entreprise (endogène). On pourrait ajouter la composition de l’actionnariat, les risques de dilution par recapitalisation, les opportunités spéculatives (OPA)…

- Le pricing de l’obligation dépend non seulement du risque de crédit de l’entreprise (probabilité de défaut + taux de recouvrement en cas de liquidation), mais aussi du coupon, du taux sans risque, du profil de maturité de la dette, de la possibilité que de nouvelles obligations venant à maturité avant celle qu’on considère soient émises etc.

- Le pricing d’un CDS est beaucoup plus simple, car il s’agit d’un produit "pur" : on élimine notamment l’impact des variables exogènes. Le CDS ne dépend que de 2 paramètres : (i) la probabilité d’un défaut (credit event) sur l’horizon du CDS (5 ans, par exemple), et (ii) le taux de recouvrement attendu en cas de liquidation. Contrairement aux obligations, pas de coupon, pas de dates de maturité différentes, donc on peut directement comparer les CDS de même maturité de différentes entreprises, à tout moment.

2) La prime de CDS et le cours de l’action fournissent 2 signaux différents et complémentaires :

- Le cours de l’action reflète l’intérêt (risques et opportunités) des actionnaires.

- La prime de CDS reflète le risque pour les détenteurs d’obligations.

Si je simplifie un peu pour expliquer cela avec 2 exemples :

- Tesla a une action bien valorisée mais un CDS 5 ans élevé (autour de 600 points de base) : cela signifie que le marché price un scénario où les prêteurs obligataires de Tesla font face à des risques de défaut, mais où dans le même temps les actionnaires devraient bénéficier du potentiel commercial de long-terme de l’entreprise (est-ce cohérent ? pas sûr, à mon avis). Ou alors le marché actions n’a pas encore totalement intégré les risques sur la liquidité de Tesla…

- Deutsche Bank voit son action chuter à un niveau faible de capitalisation, tout en ayant un CDS 5 ans relativement modéré (150 points de base) : cela signifie que le marché anticipe une possible insuffisance de fonds propres, rendant nécessaire une recapitalisation dilutive pour les actionnaires actuels. Mais dans le même temps, le marché pense que les prêteurs obligataires de Deutsche Bank ne devraient pas faire face à un défaut - peut-être en raison du soutien implicite d’un Etat fort, l’Allemagne, qui considère peut-être cette banque comme "too big to fail".

Donc il faut avoir dans la tête une "matrice" à 4 cadrans (CDS bas / action faible, CDS bas / action forte, CDS élevé / action forte, CDS élevé / action faible). Toutes les configurations sont possibles, même si la plupart du temps il y a une forte corrélation entre le cours de l’action et le CDS. Si cette corrélation s’affaiblit, c’est que le marché commence à envisager des scénarios où les intérêts des actionnaires et ceux des prêteurs obligataires sont divergents.

Je pense que les CDS peuvent aider à éviter de grosses bêtises du genre Sears, car souvent les petits porteurs se focalisent sur les problématiques industrielles, la croissance et la profitabilité, en ignorant la liquidité, qui peut tuer une entreprise même profitable, même en croissance. Perso je n’achèterais pas une action dont le CDS 5 ans dépasse 300 points de base.

3) Quand on compare des CDS, il faut garder à l’esprit que les taux de recouvrement en cas de liquidation peuvent varier fortement d’un secteur à l’autre :

- Pour des secteurs industriels à forte intensité capitalistique, faire l’hypothèse d’un taux de recouvrement de 40% est raisonnable.

- Pour des secteurs à faible intensité capitalistique, 20% est raisonnable.

- Pour des banques, ça dépend s’il y a eu ELA (Emergency Liquidity Assistance) ou pas : en cas d’ELA, le taux de recouvrement peut être faible car la plupart des bons actifs auront été pris en garantie par la banque centrale. Mais en fait, le taux de recouvrement est quasi "politique" : en général les autorités publiques font attention à ne pas trop "brûler" les détenteurs d’obligations senior.

- Pour des souverains, le taux de recouvrement est une décision politique. On peut supposer 30% mais ça peut varier énormément : le taux de recouvrement va être plus élevé pour un pays sous programme FMI que pour un pays qui fait de son défaut un geste politique contre les marchés (du type Venezuela).

Une fois qu’on a fait l’hypothèse d’un taux de recouvrement, on peut déduire des primes de CDS une probabilité de défaut sur l’horizon du CDS.

4) Mes repères perso pour des CDS 5 ans (je simplifie beaucoup) :

- 500 points de base = perte d’accès au marché (Tesla, la Turquie sont à environ 600 points de base actuellement)

- Pour mes dépôts bancaires : 50 points de base max pour la banque en temps normal, 100 points de base max en temps de crise (idéalement…)

- Pour une entreprise industrielle (investissement boursier) : de préférence moins de 200 points de base, jamais au-dessus de 300 points de base

Pour les banques, plus que le niveau absolu, ce qui compte c’est le spread entre le CDS de la banque et le CDS du souverain : si les 2 restent assez proches, cela veut dire que le marché considère que l’Etat (même en difficulté) va continuer à soutenir la banque en cas de besoin. Si ça s’écarte beaucoup, il faut s’inquiéter pour la banque (particulièrement si elle diverge de ses consoeurs du même pays).

5) L’article des Echos n’est pas très pertinent : la grosse différence entre aujourd’hui et 2007, c’est qu’aujourd’hui l’essentiel du financement interbancaire se fait de façon sécurisée, par pension livrée (repo), et non plus en blanc (pas de collatéral). Cela diminue beaucoup les risques de perte sur des transactions interbancaires (le prêteur a propriété légale du collatéral en cas de défaut de l’emprunteur).

En fait, le graphique est même un peu trompeur, car pour une banque comme Deutsche Bank le risque n’est pas du tout sur le financement interbancaire, mais sur tout le reste… Le financement interbancaire de Deutsche Bank est proportionnellement minuscule précisément parce qu’elle a un bilan énorme et complexe, difficile à appréhender (et c’est cela, le risque principal). Je suis actionnaire Deutsche Bank dans un pari contrarian et spéculatif, mais je préfère des banques de détail davantage plain vanilla (Nordea, Skandinaviska Enskilda Banken) ou très diversifiées géographiquement (HSBC).

Sur les risques pour le système financier, la presse française me semble à côté de la plaque, je vous conseille plutôt les rapports de stabilité financière de la BCE et (moins bien) de la Banque de France. Si vous lisez l’anglais, Reuters et Bloomberg ont de bons journalistes spécialisés qui font de la bonne vulgarisation et résument les analyses intéressantes des secteurs public (banques centrales) et privé (analystes).

Dernière modification par Scipion8 (20/08/2018 01h26)

Mots-clés : actions, krach, marché

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[+9]    #2 23/10/2018 18h05

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Quelques réflexions générales :

1) La dette d’un agent économique, c’est l’actif d’un autre. C’est une évidence, mais il faut la rappeler : la hausse de la dette mondiale est le reflet de l’enrichissement sans précédent des prêteurs. La dette en elle-même n’est pas mauvaise, ni même dangereuse : c’est son éventuel excès en rapport avec la solvabilité des emprunteurs qui l’est. La question n’est donc pas sur le niveau de la dette, mais sur sa soutenabilité. Il faut donc comparer les niveaux de dette des différents types d’acteurs avec leur capacité à rembourser, elle-même liée à la croissance structurelle des économies. L’argent emprunté a-t-il été investi dans des projets créateurs de richesse (= TRI suffisant), ou à fonds perdus ? Cela fait toute la différence.

2) La capacité des Etats à rembourser leur dette dépend en partie de leur capacité à taxer. Depuis 10 ans, le taux de taxation moyen (en % du PIB) dans l’OCDE n’a augmenté que légèrement. Donc la capacité à taxer davantage dans l’OCDE paraît suffisante. Mais il y a de grandes variations entre pays : en France, depuis 10 ans, l’Etat (et ses démembrements) ont taxé davantage les agents économiques, et le taux de taxation est très élevé en comparaison internationale (2e dans l’OCDE après le Danemark). Cela suggère qu’en France l’Etat aura du mal à taxer davantage en cas de difficultés à rembourser la dette, sauf consensus social (pas impossible).


3) La capacité des Etats à rembourser leur dette dépend aussi du niveau de la dette (en proportion du GDP). Sur ce critère, effectivement on peut se poser des questions, car le niveau moyen de la dette publique a nettement augmenté dans l’OCDE ces 10 dernières années. Là aussi, la France est très mauvaise élève.


4) En cas de dette publique insoutenable, il y a 4 solutions : (i) austérité, (ii) inflation, (iii) monétisation, ou (iv) défaut. Il s’agit d’un choix politique pour tout pays confronté à cette situation :

- Les agents économiques endettés auront tendance à vouloir de l’inflation pour dégonfler leur dette, alors que les agents économiques prêteurs (par exemple les rentiers) auront tendance à vouloir maintenir une inflation basse. Dans la zone euro, l’objectif de maintenir l’inflation en-dessous de 2% a été sanctuarisé dans les Statuts de la BCE ; compte-tenu du point de vue allemand et du vieillissement de la population européenne, je ne pense pas qu’il sera remis en cause.

- Un défaut aurait des conséquences encore plus catastrophiques pour les épargnants (et nous vivons dans des démocraties d’épargnants, qui votent beaucoup plus que les pauvres). La dette publique française est d’abord détenue (directement ou indirectement) par les ménages français. Et c’est de plus en plus le cas pour la dette italienne ou espagnole - du fait du retrait des investisseurs étrangers ces 10 dernières années. Donc je ne crois pas qu’un défaut serait politiquement tenable.

- Il reste donc l’austérité (évidemment la solution raisonnable, pour des Etats obèses comme chez nous) ou la monétisation (c’est-à-dire l’achat de la dette publique par la banque centrale, dont la puissance de feu est par définition illimitée). Bien sûr le financement des Etats par la BCE est interdit par ses statuts. Mais en cas de crise majeure dans la zone euro (remettant en cause son existence), perso je crois que la solution choisie sera une combinaison d’austérité et de politique monétaire non-conventionnelle reposant largement sur des achats de dette souveraine (les achats de la BCE étant conditionnés aux efforts d’austérité par les Etats). La variable d’ajustement dans un tel scénario serait l’euro, qui devrait se déprécier. (C’est un scénario catastrophe, hein, auquel je ne crois pas - c’est juste pour dire qu’à mon avis, il n’y aura jamais de défaut souverain pour la France.)

5) La zone euro est une construction politique - les vrais risques pour son existence sont politiques et non pas économiques. Même en cas de situation économique grave (comme pour la Grèce depuis 2011), on peut toujours trouver des solutions, passant notamment par la BCE et le FMI. Les 2 ont une très grande puissance de feu. Mais ces institutions ne peuvent agir efficacement que si les Etats bénéficiaires démontrent une volonté politique de coopérer (passant notamment par l’austérité, mais pas seulement). Perso je crois que même si c’est parfois difficile (par exemple la Grèce), les peuples et leurs dirigeants voudront toujours éviter la catastrophe. En Europe, on finira toujours par accoucher (difficilement) de compromis politiques permettant de trouver des solutions (idem pour le Brexit), parce qu’on a passé la première moitié du 20e siècle à essayer d’autres approches pour régler les problèmes et malgré la bêtise contemporaine, le populisme, la xénophobie etc., on ne veut pas y retourner.

6) Le vieillissement de la population est un phénomène mondial avec des conséquences politiques et économiques majeures. Ce vieillissement devrait rendre les sociétés structurellement plus conservatrices et hostiles à l’inflation. C’est une des raisons pour laquelle je ne crois pas du tout à un retour de l’inflation ; au contraire la déflation me semble le risque principal du point de vue économique (un scénario à la japonaise).

7) La conflictualité dans le monde n’a jamais été aussi basse. Penser que les menaces n’ont jamais été aussi grandes, que le monde est ravagé par des conflits, que nos sociétés sont en péril, ça fait vendre du papier, mais c’est juste faux. D’année en année, les conflits mondiaux font de moins en moins de victimes (même si c’est bien sûr toujours trop) ; les victimes sont essentiellement concentrées dans 3-4 pays. Il faut rappeler que l’état prolongé de paix dans lequel nous vivons depuis 1945 (je ne parle pas des conflits localisés ni du terrorisme occasionnel) est historiquement exceptionnel. Le "doux commerce" de Montesquieu fait son effet : malgré les rodomontades d’un Trump ou d’un Poutine, nul n’a intérêt à un conflit : ni les USA, ni la Russie, ni la Chine, ni l’Europe. Ni surtout les épargnants vieillissants qui décident de qui détient le pouvoir, et qui souhaitent une prospérité paisible. Tout le monde a intérêt économiquement à s’entendre, donc c’est inévitablement ce qui arrive politiquement.

8) Le QE a des effets persistants. Les banquiers centraux débattent pour savoir si le QE agit davantage via les flux d’achat ou via les stocks accumulés par les banques centrales. Les 2 sont sans doute pertinents. Perso, je pense que "l’effet stock" du QE est important, notamment car l’effet d’éviction de ces stocks continue de jouer bien après la fin des achats par la banque centrale : les obligations souveraines achetées massivement par les banques centrales ne sont simplement pas disponibles pour les investisseurs privés, donc même quand ils voudront réduire leur risque (vendre les actions et acheter les obligations souveraines étant le pattern habituel), ils devront conserver des actifs risqués.

9) Les PER avancés (calculés sur les profits prévus) ont déjà bien baissé en Europe. Il y a un effet ciseaux important : baisse des cours + hausse continue des profits (même si ça tend à ralentir). Cela a déjà ramené les PER avancés sur les plus bas niveaux depuis 5 ans, et en-dessous de la moyenne de long-terme ! Bien sûr le marché anticipe une conjoncture économique plus difficile et/ou des risques politiques dans la zone euro. Mais pour un investisseur (i) de long-terme, (ii) optimiste sur l’avenir de la zone euro et (iii) avec la capacité (psychologique et financière) d’absorber les chocs, les marchés européens me semblent déjà revenus à des niveaux d’achat.

Mes conclusions pour l’investissement :
- Les prophètes de malheur auront tort, comme d’habitude.
- Dans la zone euro, il y a bien un risque politique, mais on finira toujours par trouver des solutions.
- Les effets persistants du QE devraient amortir le choc.
- Le fait que les PER avancés européens soient déjà revenus à des niveaux historiquement raisonnables rend un krach majeur (-30/-40%) improbable à mon sens, hors catastrophe politique.
- Dans une logique de long-terme, je continue à acheter régulièrement des actions européennes, américaines et chinoises, en cohérence avec cette vision optimiste.
- Toutefois j’évite ou sous-pondère les secteurs qui devraient souffrir de la dégration possible à court-terme de la conjoncture (cycliques, bancaires, construction).

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[+10]    #3 04/03/2020 19h27

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Trois fois -1 parce que "je n’ai pas de file de mon portefeuille", alors que j’en ai une, ça commence à bien faire. Pour mes admirateurs wink , voici la file :
Portefeuille d’actions de Bernard2K

Humble ou non, à la rigueur, on s’en fout, non ? On est là pour discuter des actions, non ?

Mais, si on se penche vraiment sur la question "humble ou non", considérez SVP les points suivants :
- J’ai un portefeuille tout petit et tout mal foutu, je l’ai écrit (depuis 9 mois), même si ça a échappé à certains.
- Il y a quelques années, j’ai fait des trades sur eToro, tout pourris, je l’ai écrit (plusieurs fois).
- Je n’ai absolument pas vu venir la crise de 2008, je l’ai écrit aussi.
- J’ai vu venir ce crash (pour l’instant) suite au Coronavirus, je l’ai écrit aussi.

Si l’on considère l’ensemble de ces déclarations, je n’ai pas l’impression d’un manque d’humilité. Dans ma relation avec la bourse, j’ai écrit ce qui foire (beaucoup de choses) et ce qui réussit (très peu de choses). Il semblerait que je commence enfin à y comprendre un peu quelque chose, ouf, je suis content, je l’écris aussi.

Par ailleurs, quand un autre foreumeur dit dans le présent fil qu’il avait vu venir "facilement" la crise de 2008, ou quand GBL dit qu’il a plus d’un million sur son PEA, eh bien déjà je ne trouve pas que ça soit un manque d’humilité (l’idée me paraîtrait vraiment saugrenue) ; mais vous conviendrez que certains foreumeurs pourraient pourtant trouver que ça manque d’humilité. Moi je trouve simplement que ce sont des faits utiles à la compréhension du sujet. Et, de toute façon, surtout, je n’irais jamais mettre des -1 de réputation pour cela. Donc, il me semble qu’il y a un peu deux poids deux mesures.

Bon, après ces quelques explications, je vais laisser les détenteurs du savoir boursier parler entre eux, ceux qui ont des "vrais" portefeuilles, dûment publiés… Merci pour ceux qui ont répondu sincèrement à mes questions, pas merci à ceux qui mettent des -1 pour des raisons douteuses.

Dernière modification par Bernard2K (04/03/2020 19h35)


Les vacances sont finies, au travail !

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[+9]    #4 08/04/2020 15h25

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Le dernier mémo de l’investisseur Howard Marks est en ligne (6 avril 2020) :
https://www.oaktreecapital.com/docs/def … rating.pdf

Voici un extrait qui répond à certaines interrogations de ce fil de discussion :

Howard Marks a écrit :

(…) Certaines des questions les plus intéressantes en matière d’investissement sont particulièrement appropriées aujourd’hui : "Comme vous vous attendez à d’autres mauvaises nouvelles et que vous pensez que les marchés pourraient encore baisser, n’est-il pas prématuré d’acheter ? Ne devriez-vous pas attendre le point bas ?

Pour moi, la réponse est clairement "non". Comme nous l’avons déjà dit, nous ne savons jamais quand nous avons atteint le fond. Un point bas ne peut être connu qu’avec le recul : c’était la veille du jour où le marché a commencé à monter. Par définition, nous ne pouvons pas savoir aujourd’hui s’il a été atteint, puisque cela dépend de ce qui se passera demain. Ainsi, "je vais attendre le point bas" est une affirmation irrationnelle.

Si vous voulez, vous pouvez choisir de dire : "Je vais attendre que le point bas soit passé et que le marché ait commencé à monter". C’est plus rationnel. Cependant, premièrement, vous dites que vous êtes prêt à manquer le point bas. Et deuxièmement, l’une des raisons pour lesquelles un marché commence à monter est que le sentiment d’urgence des vendeurs s’est atténué, et avec lui la pression vendeuse. Cela signifie que (a) l’offre à la vente diminue et (b) les acheteurs eux-mêmes poussent le marché à la hausse, car ce sont eux qui sont maintenant très motivés. Ce sont ces éléments qui font monter les marchés. Donc, si les investisseurs veulent acheter, ils doivent le faire à la baisse. C’est à ce moment que les vendeurs ressentent le plus d’urgence et que les achats des acheteurs n’arrêteront pas la chute des prix des actions.

(…)

Le vieux dicton dit : "Le mieux est l’ennemi du bien". De même, attendre le point bas peut empêcher les investisseurs de faire de bons achats. L’objectif de l’investisseur doit être de faire un grand nombre de bons achats, et pas seulement quelques achats parfaits. Pensez à votre comportement dans la vie de tous les jours. Avant chaque achat, insistez-vous pour être sûr que l’objet en question ne sera jamais disponible moins cher ? C’est-à-dire que vous achetez au plus bas ? J’en doute. Vous achetez probablement parce que vous pensez obtenir un bien à un rapport qualité/prix intéressant. N’est-ce pas suffisant ? Et inversement, vous vendez parce que vous pensez que le prix de vente est adéquat ou plus, et non parce que vous êtes convaincu que le prix ne pourra jamais être plus élevé. Persister pour n’acheter qu’au point bas et ne vendre qu’au plus haut serait paralysant.

Au contraire, j’ai donné à ce mémo le titre de "Calibrage" car je pense que le positionnement d’un portefeuille devrait changer avec le temps en fonction de ce qui se passe dans l’environnement. À mesure que l’environnement devient plus dangereux (avec des prix élevés, une aversion au risque faible et l’absence de peur), l’attitude défensive d’un portefeuille devrait être accrue. Et à mesure que l’environnement devient plus favorable (avec des prix bas, une aversion au risque élevée et la peur qui prévaut), son agressivité devrait être accrue. Il s’agit clairement d’un processus de réajustement progressif, et non d’un processus de tout ou rien. L’objectif ne devrait pas être de ne faire cela qu’aux points bas et hauts.

Je pense donc qu’attendre le point bas est une folie. Quels devraient donc être les critères de l’investisseur ? La réponse est simple : si quelque chose est bon marché - en fonction de la relation entre le prix et la valeur intrinsèque - vous devriez acheter, et si le prix baisse encore, vous devriez acheter davantage.

Je ne veux pas donner l’impression qu’il est facile d’acheter alors que les prix chutent. Ce n’est pas le cas, et en 2008, Bruce et moi avons passé beaucoup de temps à nous soutenir mutuellement et à débattre pour savoir si nous achetions trop vite (ou trop lentement). Les nouvelles étaient terribles et, pendant un certain temps, il semblait que le cercle vicieux de l’effondrement des institutions financières allait se poursuivre sans être maîtrisé. Les mauvaises nouvelles rendent les achats difficiles et font dire à beaucoup de gens : "Je ne vais pas essayer d’attraper un couteau qui tombe".  Mais c’est aussi ce qui pousse les prix à des niveaux absurdement bas. C’est pourquoi j’aime tellement le titre de Doug Kass que j’ai mentionné plus haut : "Quand le moment sera venu d’acheter, vous ne voudrez pas". Il n’est pas facile d’acheter quand les nouvelles sont terribles, que les prix s’effondrent et qu’il est impossible d’avoir une idée de l’endroit où se trouve le fond. Mais cela devrait être la plus grande aspiration de l’investisseur.

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Favoris 8   [+9]    #5 05/06/2020 09h26

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A mon avis, la meilleure mesure de la surévaluation ou sous-évaluation d’un marché boursier est la prime de risque du marché actions (equity risk premium), qui représente la rémunération d’un actionnaire pour le risque pris en achetant des actions, par rapport au taux "sans risque". Plus elle est élevée, plus il est intéressant a priori de s’exposer aux actions.

Le principal avantage de la prime de risque du marché actions par rapport aux ratios de valorisation (PER, VE/EBITDA etc.), c’est qu’elle permet de prendre en compte les fluctuations du taux sans risque (influencé par les banques centrales).

Aswath Damodaran mesure cette prime de risque du marché actions régulièrement sur son blog (writing -> blog posts), et il vient de publier une mise à jour (pour les USA). Il y explique en détail la méthodologie (il faut mettre à jour à la fois le taux sans risque et les prévisions de résultats pour les entreprises cotées).

Sur les 60 dernières années (mesures en fin d’année), la prime de risque du marché actions US (S&P500) a évolué entre 2% (fin 1999 = bulle internet) et 6,5%, avec une moyenne à 4,2%.

Le 23 mars 2020, elle a atteint un pic à 7,75%, du jamais vu : c’était tout simplement la meilleure opportunité pour investir dans les actions US depuis au moins 60 ans !

Avec le fort rebond des marchés depuis lors, la prime de risque du marché actions US est revenue à 5,8% : toujours largement au-dessus de sa moyenne historique. C’est pourquoi, malgré des ratios de valorisation élevés, il demeure pertinent à mon sens de s’exposer aux actions américaines.

A mon avis, le focus excessif sur les ratios de valorisation conduit à ignorer les variations du taux sans risque (c’est-à-dire les actions des banques centrales), et à manquer ainsi des opportunités.

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Favoris 3   [+9]    #6 30/08/2021 00h19

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Bonsoir à tous,

InvestisseurHeureux a écrit :

Et pour cause, les banques centrales par leurs actions contribuent à fausser lesdits critères historiques.

Il est vrai que les banques centrales faussent les valorisations. Mais ce n’est pas la question selon moi ; il me semble que la vraie questions est plutôt "quelle est la bonne valorisation en conséquence de telles actions ?". Achèterions nous à un P/E de 100 ? De 80 ? De 50 ? Oui, les marchés sont chers pour une raison, mais sont-ils trop chers ? J’ai l’impression qu’ils le sont.

Mon premier message (#7110) faisait référence à un podcast de Meb Faber qui justement s’attaque notamment à la corrélation "taux d’intérêts vs valorisations" (pour rappel, ici). Il cite justement l’argument ci-dessus.

InvestisseurHeureux a écrit :

Mais cela pourrait très bien être la nouvelle normalité : les états sont tellement endettés que les banques centrales sont "forcées" de continuer ce qu’elles font depuis une décennie.

Lorsque les acteurs financiers usent de l’argument de la "nouvelle norme", cela me renvoie directement à tous les épisodes de corrections brutales. Si le marché s’est plus ou moins comporté de la même manière pendant 150 ans, il est fort probable qu’il revienne à sa norme intrinsèque. Et donc que la situation que nous vivons s’agisse d’une anomalie plutôt que d’une nouvelle norme. S’il s’agit néanmoins d’une nouvelle norme, dire que c’est le cas revient à prédire quelque chose qui ne s’est encore jamais produit. Il faut avoir des arguments solides smile

InvestisseurHeureux a écrit :

Seule une inflation élevée pourrait éventuellement entraîner un changement de leur politique, et donc impacter fortement les valorisations boursières.

Certes, l’inflation pourrait venir contrer cela en effet. Mais pas l’inflation seulement. Nous ne sommes jamais à l’abri de l’effondrement d’un acteur quelconque qui fasse château de cartes comme cela s’est déjà produit. Et quand les prix sont élevés, ou en tous cas plus que ce que les fondamentaux ne pourraient justifier selon les opérateurs à l’instant t, la correction peut-être d’ampleur.

JMeuret a écrit :

De manière générale, shorter est réservé aux investisseurs les plus avertis…

Donc je dirai que quelqu’un qui demande comment shorter sur ce forum (je parle pas de vous mais de manière générale) ne devrait probablement pas le faire.

Ma question portait sur les ETF ; je n’en ai pas trouvé sur DeGiro qui me permettraient de shorter sans levier. Il y en a probablement mais je suis visiblement passé à côté, d’où ma question. J’imagine que je ne suis pas le seul à me l’être posée et j’en appelais à la communauté.

Je réfléchis en parallèle à une stratégie d’options mais ce qui m’embête, c’est le Têta. Je ne peux pas timer ce genre d’évènement, et encore faudrait-il que j’ai raison. Pour la problématique Têta, les ETF me rendent service. Pour avoir raison ou non, les options sont plus adaptées.

JMeuret a écrit :

Bref, je n’ai aucune idée de l’évolution du SP500 dans les semaines ou mois à venir, mais vous et eux non plus. Et s’il s’avère que le SP500 s’effondre vous ne pourrez pas dire J’avais raison, mais plutôt J’ai eu de la chance.

Quand c’est le fruit d’une étude statistique et en considérant que le passé se reproduit (ce qui se vérifie sur le S&P 500 notamment, et puisque vous serez probablement d’accord pour dire qu’il faut être long sur le long terme, et cela se base sur le passé), je ne suis pas d’accord avec vous. Si le S&P monte à un P/E de 100, je pense que vous auriez bien tort de dire que le marché est un jeu de hasard et d’aller vous mettre long en disant que de toutes manières, personne ne sait.

J’en veux pour preuve la bulle Japonaise de 1987 (voir Nikkei ci-dessous). Si c’est un jeu de hasard, il me semble pourtant assez évident que quand tout est cher, c’est une mauvaise idée d’acheter. Et cher, en matière de ratio, semble pouvoir se démontrer sur le marché Japonais.



JMeuret a écrit :

Le plus haut historique, j’avais lu je ne sais plus ou (et j’ai la flemme de rechercher alors à prendre avec des pincette), que si vous achetiez une action à son plus haut historique, vous aviez statistiquement plus de chance de gagner en bourse). Tout ça pour dire qu’on peut faire dire tout et n’importe quoi à des chiffres.

Sans animosité, c’est avec ce genre de réflexion qu’on fait effectivement dire tout et n’importe quoi aux chiffres… sur 100 ans vous aurez probablement raison partout, mais personnellement je n’ai que faire d’un investissement sur 100 ans. Ce que je cherche, c’est l’alpha, pas le gain. Gagner 2% parce qu’on a attendu 20 ans que le marché remonte lorsque le reste du marché fait +100% sur la même période, c’est un gain absolu mais une perte énorme relative. Il faudrait sourcer, préciser et expliquer si vous avez le temps. Sinon, vous pourrez dire après 20 ans "vous voyez, j’ai gagné !", et c’est vous qui aurez dit n’importe quoi.

JMeuret a écrit :

Quel serait votre STOP LOSS et pourquoi ?

Quel serait votre prise de bénéfice et pourquoi ?

Pourquoi maintenant et pas fin 2020 où le PER Ratio était bien + élevé qu’actuellement ? et le SP500 beaucoup beaucoup plus bas.

- Stop loss lié au P/E. Si les résultats montent en flèche, le P/E redescend. S’il redescend proche de sa MM30, je pense qu’il faut vendre.
- Take Profit lié au P/E. Retour à la MM30 par exemple.
- Pourquoi maintenant et pas fin 2020 ; c’est un peu l’équivalent de demander à un stock picker pourquoi maintenant et pas avant. Il vous répondra, comme moi, que si le marché retourne à sa moyenne, le timing importe peu. Il faut juste être entré et attendre. Sur une logique de long terme, cela n’a pas d’importance.

misteronline a écrit :

Dans une optique long-terme, shorter le marché est toujours perdant.

Je sais que c’est un peu la religion sur ce forum et j’y adhère en grande partie. Mais je vous renvoie au graphique ci-dessus. Allez dire aux investisseurs qui se sont mis long en 1987 que sur le long terme, ils seront gagnants. Attendre 20 ans pour retrouver sa mise, c’est du long terme trop long terme pour moi.

Par ailleurs, allez dire aux fonds qui ont shorté le marché à l’époque que shorter le marché, sur le long terme c’est perdant… je pense qu’ils vous riront au nez.

Bien sûr, sur le long terme il faut être long. Cela n’empêche pas qu’il y ait des périodes de récessions longues pendant lesquelles être short est bien meilleur. Voir ci-dessous (source ici):



misteronline a écrit :

Pour moi il faut raisonner à la bourse comme avec l’immobilier locatif.
J’achète des actions de qualité (=j’achète un petit studio bien placé).
Je suis assez sûr du rendement locatif (=je pense raisonnable à long-terme que le ROCE - Return On Capital Employed sera de disons 8%).

Parfois l’immobilier va baisser de 30% comme en région parisienne au début des années 90.
Parfois les actions vont baisser de 40% comme cela est arrivé très souvent.

Mais vous continuez de percevoir les loyers (=les dividendes), et un jour ou l’autre, le prix du bien de qualité va retrouver votre prix d’achat, et même prendre de la valeur (=votre panier d’actions de qualité va retrouver son prix moyen d’acquisition puis prendre de la valeur).

A la différence près que si vous achetez à 8% et que l’actif monte à 12%, vous avez perdu 33% de votre investissement initial. L’immobilier, comme sur les marchés, répond à une valorisation. Si vous avez acheté 8% quelque chose qui vaut 12%, vous avez acheté trop cher. Effectivement vous percevrez les loyers, mais vous auriez pu percevoir 33% de plus, ou faire autre chose des 33% de plus en capital de départ économisé…

bibike a écrit :

Plutôt que de shorter le marché, être sélectif et ne pas acheter les actions en bulle ?

Cela revient à anticiper qu’on perdra moins. Les values ne montent pas pendant les crises, elles perdent moins. Si j’anticipe un mouvement à la baisse, pourquoi rentrer long tout court ?

bibike a écrit :

Analyser la cherté du marché boursier dans son ensemble sur la base de recettes historiques lointaines, cela me fait penser aux graphiques* de Friggit sur l’immobilier résidentiel en France……

La courbe de Friggit est mal sourcée, assez trafiquée, n’est plus enseignée nul part, mais quand bien même ce serait une source fiable ; vous comparez un marché de très long terme avec un marché de moyen terme. Sur le S&P 500, le retour à la moyenne du P/E n’a jamais pris plus de 10 ans. Mieux, si vous êtes dans le 9 ème décile (comme aujourd’hui, 92.5% percentile), cela n’a jamais pris plus de 4 ans pour retomber sous ce décile. S’il y a retour à la moyenne du P/E, ce sera soit par une baisse de valeur, soit par une hausse de résultats, et à priori sous 4 ans.

bibike a écrit :

Quand on regarde le train passer la vie passe aussi et notre temps sur Terre est limité… Il y aura toujours quelqu’un pour dire que l’on est en bulle…

Et toujours quelqu’un pour dire le contraire..! smile Cela ne me semble pas être un argument en réponse à l’analyse factuelle ci-dessus. Les taux de croissance prévisionnels sont prévisionnels. Tout comme en 2007, en 1999, etc… les forecasts ont tous fini dans la corbeille. Comme écrit plus haut dans mon message, les taux ne sont pas censés avoir un effet particulier sur le marché actuel. C’est la direction des taux qui en a un, à priori, et ça reste encore à prouver quand on regarde la valorisation des marchés il y a 40 ans et celle d’aujourd’hui en termes de P/E. Des taux 10x inférieurs aujourd’hui, mais des P/E semblables.

Kaldabra a écrit :

Les fonds alternatifs d’assurance sont toujours basés d’une manière ou d’une autre sur le fait d’être long vol. En temps normal cette stratégie perd de l’argent car la protection voit sa valeur diminuer avec le temps, par contre quand le VIX s’excite la protection voit sa valeur exploser. Certains fonds ajoutent à ça une pure exposition à la baisse en achetant des puts OTM non hedgés.

C’est exact ; en options vous perdez du Têta, et en futures vous perdez en roulant votre position puisque c’est un marché structurellement en backwardation.

RadioInvest a écrit :

Si l’on pense que la tendance future globale du marché est baissière, autant rester à l’écart des actions.
Si l’on pense le contraire, autant rester investi.

Sauf que ces débats sont éternels et que le marché garde in fine toujours sa tendance haussière.

J’ai tendance à croire que "shorter" le marché, notamment le S&P500 est un métier. Cela nécessite probablement de multiples couches de stratégies de couverture, une réactivité hors-norme avec des outils adaptés ; cela n’est à mon avis pas l’idéal pour un particulier.

Profondément en désaccord : votre analyse est asymétrique. Si vous pensez que la tendance est baissière, il faut vendre au même titre que vous achetez quand vous pensez que la tendance est haussière. Faute de quoi vous exercez un biais dans votre position. Quand à l’argument de la tendance haussière in fine, j’y réponds plus haut dans mon message ; sur 15 ans vous aurez toujours raison. Mais le marché se retourne dans un an, vous aurez raison… en faisant une performance X0% inférieure à celui qui aurait shorté aujourd’hui.

Par ailleurs, si vous ne vous couvrez pas contre une baisse quand vous êtes long, pourquoi vous couvrir d’une hausse quand vous êtes short ? Cela me semble très biaisé et reflète votre "psychisme" comme vous le dites ; vous avez une aversion au risque de hausse pour une position short mais pas de baisse pour une position longue.

dangarcia a écrit :

A mon sens l’investisseur qui est mal à l’aise à l’idée d’être trop exposé aux variations des marchés financiers a simplement commis l’erreur de sous estimer son aversion au risque.

Je ne suis pas mal à l’aise à l’idée d’être trop exposé, je dis simplement que je souhaite prendre une position short ; être short ou long, c’est la même exposition (modulo la tendance et le financement). Par contre vous semblez être mal à l’aise à l’idée d’être short smile Si vous pouvez m’expliquer pourquoi, je suis curieux de le savoir, je cherche des contre-arguments à mon raisonnement.

--------------------------------------------------------------------------------------------------

Une analyse supplémentaire :

- La source des données est celle-ci, les graphiques et l’analyse sont de moi. Je regarde ici le PE (en bleu) versus les earnings (en rouge). La zone grise correspond au dernier décile des valeurs du PE.



Ce graphique montre que lorsque nous atteignons le dernier décile des valeurs du P/E, il ne se passe rarement plus de 3 ans pour que le P/E redescende. Le graphique de mon message précédant montrait d’ailleurs qu’on revenait souvent à le moyenne en moins de 8 ans. Il montre également des rendements records (mais c’est en valeur, pas en croissance). Si l’on regarde bien, on se rend compte que le rendement du S&P 500 stagne plus ou moins depuis 2006.

- Pour autant ce n’est pas parce que le P/E redescend que le S&P 500 redescend également. Et c’est ça qui est intéressant ; l’analyse du P/E occulte le fait qu’il s’agit de deux facteurs : earnings et prix. En isolant ces deux variables, on obtient le graphique ci dessous :



Ce que l’on voit, c’est que les hausses de P/E de 2000 et 2009 proviennent uniquement d’une chute des Earnings (ou le voit d’ailleurs sur la courbe rouge du graphique précédent, en miroir avec la courbe bleu sur ces deux périodes). Ce qui semble inédit aujourd’hui, c’est que la hausse du P/E aujourd’hui ne soit pas l’affaire des Earnings. Autrement dit, tout devient très cher non pas parce que les Earnings se cassent la figure, mais bien parce que le prix s’envole pour des Earnings stables.

Conclusion : sans ces deux pics de P/E de provenance Earnings pendant des crises, nous sommes donc à un plus haut historique, plus haut même qu’en 1999. Quelques années après, nous disions que la bulle internet était une folie, mais maintenant, cela n’en serait pas une ? Je veux bien l’entendre, mais pour l’instant je suis sceptique.


Amicalement,
Ursule

Dernière modification par Ursule (30/08/2021 07h40)

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Favoris 1   [+8]    #7 31/08/2021 13h20

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Bonjour à tous,

Merci pour vos réponses, critiques et réflexions.

BulleBier a écrit :

Tout cela Ursule, ce n’est vrai que si on achète l’indice au pic, rempli de banques en surchauffe et de bouses.

Je ne comprends pas bien le raisonnement ici ; si vous shortez l’indice trop tôt ou trop tard mais que vous captez quand même une partie de la chute, vous gagnerez plus que l’investisseur qui est long.

Mettons que l’indice chute de 15% et que vous n’arriviez à attraper que 7.5% après rachat de vos positions, vous vous retrouvez à faire +7.5% quand l’investisseur long aura enregistré une perte.

Je sais bien qu’on n’achète jamais au plus bas ni ne vend au plus haut. Mais je vous retourne la remarque : pourquoi être entré dans le marché s’il n’est pas au plus bas ? Simplement parce que ce qui est intéressant c’est d’attraper un peu de performance, pas d’attraper toute la performance (puisque c’est statistiquement très peu probable).

Que le marché soit au plus haut ou non, ce qui est importe à l’investisseur short, c’est de pouvoir sortir quand l’indice sera plus bas.

BulleBier a écrit :

Si on achète des bonnes entreprises a prix raisonnable (10-20 PE selon la croissance), un black swan ne se voit meme pas sur la performance a long terme, ni meme a moyen terme. Au pire une mauvaise performance pour 1-2 ans maximum, suivi de forts rebonds.

C’est vrai que cela ne se voit pas à LT et je suis d’accord avec votre raisonnement. Par contre, entre celui qui aura shorté et aura acheté ces valeurs un peu plus basses et celui qui sera resté long et aura gardé lesdites valeurs, l’écart de performance sera significatif.

BulleBier a écrit :

Vous vous embarquez dans de la speculation pour beaucoup de stress pour rien. J’ai chargé la barque en Ab Inbev a 12-15 le PE selon la cyclicalité des devises, en Softbank qui vaut moins que sa participation en Alibaba, en British Am Tobacco a 10 PE, le crash peut bien venir.

Il me semble ici que vous faites du stock-picking et de la spéculation vous aussi. Vous seriez potentiellement plus résilient à une correction, mais je n’arrive pas à voir en quoi être short est plus stressant qu’être long. C’est une position structurellement perdante, mais conjoncturellement gagnante dans certains cas.

BulleBier a écrit :

Et même pour les entreprises de croissance, 25, 30X le PE si cela croit de 20-30% par an pendant 15 ans, un crash ne se verra pas sur la performance a long terme. La crise Financière sur le graphique de Visa ou Google, c’est rien, si j’avais pu j’aurais du charger la barque en Visa, Google et Mastercard un mois avant la crise de 2008, ma performance aurait été fantastique.

Et cela s’appelle du backtrading. Si j’avais pu shorter CGG il y a 8 ans, AirFrance il y a 2 ans, etc… Il y a des titres qui ne souffrent pas et d’autres qui souffrent plus. Si vous pouvez certifier que la croissance de certains titres sera si forte alors vous devriez y aller all-in.

BulleBier a écrit :

La selection de valeurs est la chose la plus importante.

Je suis partiellement d’accord avec vous. Il existe des tonnes de manières de gagner de l’argent en bourse, et le stock-picking n’est pas la seule.

RadioInvest a écrit :

Bel exposé Ursule mais selon moi vous souffrez d’un biais énorme : votre profession.

Toutes ces analyses sont sûrement ce qui se dit en comité dans des fonds de très haute qualité lorsqu’il faut prendre des décisions mais pensez-vous sérieusement que le particulier lambda qui achète des parts d’ETF S&P500 ou World se pose ce type de question ?

Heureusement pour lui, il ne se les pose pas sinon il n’agirait jamais.

Je ne comprends pas bien ce que le processus de décision de l’investisseur lambda en ETF globaux vient faire dans votre réflexion. L’investisseur lambda ne tiendra probablement pas ce raisonnement en effet. Mais il ne tiendra pas non plus le raisonnement de BulleBier, d’IH ou d’un stock-picker comme il en existe des dizaines sur ce forum.

Pour autant, vous serez moins critique envers le raisonnement d’un stock-picker qu’envers celui d’un investisseur short. Je ne comprends pas bien pourquoi ; l’un et l’autre tiennent un raisonnement sensiblement différent du buy & hold ETF World.

Par ailleurs, l’investisseur lambda ne participe pas directement au principe de "price discovery" du marché (définition et explication en Anglais ici sur Investopedia). Le price discovery est le mécanisme de découverte du prix de marché qui est exercé en permanence par les acteurs (quand on achète, on pense que cela vaut plus cher, quand on vend, que cela vaut moins cher). Acheter un ETF c’est simplement faire augmenter le prix de tous les titres à l’intérieur de l’ETF indistinctement.

Alors que le stock-picker y participe directement. Autrement dit, la position ETF ne faisant que répliquer les décisions du stock-picker ou du fond actif (dont les actifs ne font pas que répliquer la performance de l’indice de référence…), elle ne vient que pondérer l’impact du stock-picker.

L’avis de "l’investisseur lambda en ETF" ne me semble donc pas pertinent pour analyser la valorisation d’un marché. Sauf s’il entre ou sort brutalement ; et c’est bien le deuxième point auquel je m’intéresse maintenant.

RadioInvest a écrit :

A chaque exposé de la sorte, on a le droit à l’analyse fine du passé. A posteriori, tout est simple à expliquer ; il aurait fallu sortir à tel moment, puis rentrer à tel autre et ainsi de suite pendant 20 ans…

Je ne dis pas qu’il aurait fallu ou que je l’aurais fait (d’ailleurs je ne l’ai pas fait). Je ne dis pas que les signaux sont tellement clairs que quiconque ne les voit pas serait stupide. Je ne vous bassine pas de phrases type "Les gens qui n’entendent pas la musique prennent ceux qui dansent pour des fous" non plus. Je ne suis pas sûr à 100% d’entendre la musique et je ne suis pas sûr d’être sain d’esprit.

Et d’ailleurs… dire qu’à long-terme le marché monte, ce n’est rien d’autre qu’une analyse du passé. Pourquoi serait-ce plus cohérent dans votre cas que dans le mien ?

RadioInvest a écrit :

Un exercice du niveau de votre expertise : vous pourriez coucher sur le papier vos positions actuelles puisque vous semblez vouloir shorter le marché. Ainsi, on pourra mesurer vos capacités d’analyse dans 1, 5, 10, 15 ans.

Et puis on comparera avec un particulier lambda dépourvu de vos connaissances livresques pour voir si ce particulier aura eu tort de continuer son pauvre DCA sur un ETF S&P500 ou World.

Vous avez raison, je pourrais. Si je me décide à prendre position je le posterai sur le forum. Ceci étant dit, dans 1 à 5 ans ce sera trop tôt pour juger, et même si j’avais eu raison sur ce coup là, ça ne ferait pas de moi la bonne personne à écouter pour autant. Avoir raison une fois ne rend pas omniscient.

dangarcia a écrit :

Comme l’a démontré IH avec humour dans cette newsletter, la plupart des apprentis investisseurs qui se croient capables de prédire l’avenir macro économique et jugent indispensables de surveiller et ajuster leur portefeuille en permanence en fonction de leurs prévisions, se font littéralement défoncer par le vrai investisseur lambda qui n’y connait pas grand chose mais qui investit au feeling et laisse le temps faire son oeuvre. À partir de là est-il judicieux d’investir du temps (en plus de l’argent) à essayer de prévoir quoique ce soit ?

Totalement en désaccord ; IH ne "démontre" pas du tout qu’un investisseur lambda "défonce" un apprenti investisseur dans cet édito. Il "illustre" une conviction éventuellement, en prenant l’exemple d’un investisseur qui a choisi uniquement des titres qui ont explosé ces dernières années (GAFAM, Netflix, Visa, MasterCard, Alibaba… admettez que les exemples sont bien choisis) et en partant du principe qu’il ferme les yeux et oublie ses titres pendant quelques années. Du back-trading et une situation peu probable en même temps.

Dans les faits, il est fort probable qu’il n’oublie pas ses titres et qu’il les vende au mauvais moment, et surtout, qu’il n’ait pas acheté que ceux là… on peut d’ailleurs illustrer l’inverse : dans mon entourage on achète du Tarkett il y a 10 ans parce que le banquier a dit que c’était pas mal, on place son argent dans des grosses banques parce que de toutes manières ils font le boulot mieux que nous malgré des frais d’environ 3% par an, on achète du Carrefour parce que c’est le n°2 mondial… Je ne suis pas sûr que ces choix aient été payants sur 10 ans. Même en les oubliant.

Je ne comprends pas bien le but de cet édito mais IH pourrait l’expliquer lui-même, j’imagine qu’il n’a pas été écrit par hasard.

PyT25VC a écrit :

J’ai commencé à investir en bourse en octobre 2017.

A l’époque le CAC 40 avait commencé à dépasser les 5000 depuis quelques mois, et déjà sur les forums s’affichaient des mises en garde sur le fait que les marchés étaient hauts et risquaient une forte correction.

Si j’avais écouté les mises en garde j’aurais attendu, attendu, attendu en espérant une correction, et peut être que fin 2018 ou encore plus tard en mars 2020 je me serais enfin décidé à acheter, et encore j’aurais peut être acheté trop tôt en pleine chute, ou alors j’aurais carrément raté la reprise en misant sur un éventuel plus bas.

Aujourd’hui mon PF est à +8,4% annualisés et je ne regrette en rien mes choix d’avoir ignoré les mises en garde à l’époque, et de continuer à investir régulièrement en fonds et ETF.

Cela correspond donc à environ 1430 jours d’investissement. Le graphique ci-dessous (source des données Eikon Refinitiv, analyse réalisée par moi-même) montre en orange le CAC 40 GR (puisque vous citez le CAC 40, j’ai fait l’analyse sur le CAC 40 dividendes réinvestis) et en bleu la performance annualisée sur 1’430 jours :



Par exemple ; si vous étiez resté investi depuis 1’430 jours en mi-2007, le CAC 40 GR vous aurait rapporté dans les 20-25% (bruts d’impôts) par an.

Une autre manière d’exprimer la performance probable est la suivante :



Vous auriez eu autant de chance d’avoir une performance de plus de 7.3% par an que de moins 7.3% par an (puisque c’est la médiane). Mais ce que cela montre également c’est que vous auriez eu une probabilité de 25% d’avoir une performance négative sur la période, soit 1 chance sur 4. Autrement dit… vous avez eu de la chance de ne pas tomber sur ces périodes, et encore plus de chance de tomber au dessus de la médiane.

PyT25VC a écrit :

De toute manière, j’estime que, lorsqu’on dispose d’un horizon de placement d’une bonne dizaine d’années, il n’y a vraiment aucune raison de stresser sur un krach éventuel, celui ci arrivera forcément un jour ou l’autre, il faudra juste faire le dos rond, derrière il y aura une reprise comme ça a toujours été le cas et les marchés retrouveront leurs niveaux antérieurs.

Libre aux alarmistes de vendre leurs positions s’ils sont anxieux, personnellement je garde mon cap sans état d’âme, ça serait rigolo dans 10 ans de retrouver nos conversations d’aujourd’hui et de voir qui a eu raison et qui s’est viandé…

Ce graphique (source des données Eikon Refinitiv, analyse réalisée par moi-même) montre en bleu le CAC 40 GR et en jaune, la performance annualisée sur 10 ans :



Par exemple ; si vous étiez resté investi depuis 10 ans en 2008 (donc depuis 1998), le CAC 40 GR vous aurait rapporté dans les 10+% (bruts d’impôts) par an.

Ce que ce graphique montre, c’est que ce que vous "estimez" n’est pas correct, factuellement : pendant une période de près de 4 ans sur le CAC 40 (après 2009), un investissement réalisé 10 ans auparavant n’aurait rapporté qu’aux environs de 0% par an pendant 10 ans. Par ailleurs, le même investissement n’aurait pas rapporté plus de 6% dans la moitié des cas depuis 2005.

Je ne dis donc pas qu’il ne faut pas investir ; ce que je dis, c’est qu’il faut quand même réfléchir avant de le faire. Oui, vous pouvez investir de manière progressive, mois après mois, année après année. Mais si vous aviez constitué votre patrimoine de 2006 à 2008 par exemple, vous auriez souffert pendant des années. Je ne dis pas qu’il faut écouter les mises en garde tout le temps ; je dis simplement que les graphiques ci-dessus nous encouragent à ne pas se dire que c’est toujours le moment d’acheter.

Je pense que cela vaut donc légitimement la peine de se pencher sur la question des valorisations avant d’investir plutôt que de se dire que "de toutes manières on gagne tout le temps".

De manière générale, vous vous placez dans une logique de très long terme en négligeant mes arguments plutôt moyen terme sous prétexte que "de toutes manières à long-terme on gagne". Cela revient à dire "c’est très cher mais de toutes manières quand ça perdra il suffira d’attendre et ça gagnera de nouveau". Je comprends que vous ne vouliez pas prendre le risque de rater la hausse (cela porte un nom, c’est le FOMO - Fear of Missing Out).

Vous avez partiellement raison en termes de performance absolue (cf. graphique sur la bulle japonaise dans mon message #7119 pour un contre-exemple bien connu). En termes de performance relative, je ne suis pas convaincu que cela soit la meilleure marche à suivre.

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

D’autres éléments de réflexion :

- Le fameux Buffet indicator (graphique ci-dessous, source) estime que les valorisations boursières sont les plus élevées de l’histoire au regard du PIB.



Une des critiques majeures de cet indicateur est qu’il a un R² très faible. Comprendre : on ne peut pas se servir de cet indicateur pour prévoir la performance boursière future. Oui… mais ; le graphique ci-dessous (source)montre le rapport entre l’indicateur de Buffet (BI dans le graphique) et la performance boursière sur 5 ans qui suivait :



Ceux qui ont quelques notions de stats diront qu’effectivement, on ne peut pas tirer grand chose de cet indicateur. SAUF, que dans les 14-15 points les plus extrêmes en termes de valorisation du S&P 500 (donc les points à droite de la ligne rouge ou juste à gauche de celle-ci), le return des 5 ans qui ont suivi ont TOUJOURS été inférieurs à -20%. Or, nous sommes aujourd’hui encore plus à droite de ladite ligne rouge, autrement dit, le S&P 500 est encore plus cher par rapport au PIB que pour ces 14-15 points.

- Un indicateur cité par Scipion8 en juin 2020 dans cette file (message #6435) est le premium pour les marchés actions aux US (graphique ci-dessous). La source est le blog d’un professeur de Stern, une des écoles les plus prestigieuses du monde, à New York. Ce que ce graphique montre, c’est la prime de risque liée à l’investissement dans le marché américain depuis les années 60. L’année 2021 n’y figure pas puisqu’elle n’est pas encore finie.



Une interprétation donnée par Scipion8 dans son message #6439 est la suivante :

Scipion8 a écrit :

@Vibe : Fin 2006, juste avant le déclenchement de la crise des subprimes, la prime de risque du marché actions US était proche de sa moyenne de long-terme de 4,2%. Impossible à mon avis d’en tirer la moindre conclusion : à ces niveaux (disons entre 3,5% et 5,5%), ça peut partir violemment d’un côté comme de l’autre.

Donc la prime de risque du marché actions ne fournit pas à mon avis une information "investissable" lorsqu’elle est à ces niveaux moyens (3,5-5,5%) : elle permet juste de dire qu’a priori on n’est pas en bulle, et que les prix ne sont pas non plus particulièrement attractifs. A ces niveaux, on ne peut pas se dispenser d’une analyse fondamentale sur les risques (en l’occurrence, en 2006, l’accumulation d’énormes risques dans le système bancaire mondial).

La prime de risque du marché actions fournit sans doute une information bien plus intéressante à l’investisseur lorsqu’elle s’éloigne beaucoup de sa moyenne de long-terme : par exemple, une prime (aux USA) au-dessus de 6% doit plutôt encourager l’investisseur à augmenter son exposition aux actions, alors qu’une prime en-dessous de 3% doit plutôt l’inciter à la réduire.

Des backtests montrerait sans doute l’intérêt d’une telle stratégie de variation contracyclique de l’exposition aux actions selon les "signaux" envoyés par la prime de risque du marché actions lorsqu’elle s’éloigne trop de sa moyenne de long-terme..

Mais une telle stratégie demande une grande discipline : par exemple, si l’on fixe les "déclencheurs" à 3% et 6% :

- l’investisseur aurait réduit son exposition aux actions dès 1997, loupant ainsi 3 années de très forte croissance des marchés (1997-1999) : pas du tout facile psychologiquement… Mais il aurait pris une revanche spectaculaire dès 2000, quand le bain de sang a finalement commencé ;

- l’investisseur aurait augmenté son exposition aux actions dès fin 2008 : choix très pertinent (le rebond commençant en mars 2009), mais plus facile à dire qu’à faire dans l’ambiance de fin du monde qui régnait fin 2008.

Cette analyse de Scipion8 me semble pertinente. Or, voici, selon la même source, les Equity Risk Premiums de la période jusqu’à août :



J’ajoute par ailleurs que je lisais hier dans un papier d’une grande banque d’investissement daté du 30 août, que la prime de risque actions US était descendue à 3.45%. Soit en dessous des valeurs "moyennes", et bien en dessous de 2009.

- Autre rebond sur un post de Scipion8, dont j’admire les explications et la pédagogie ; les anticipations d’inflation remontent, ce qui devrait tirer les taux des banques centrales et au moins ceux du marché, tirant les actions vers le bas :

Les anticipations des membres FOMC sur l’augmentation des taux US sont passées de celles-ci (mars 2021, post de Scipion) :



… à celles-ci (en juin 2021) :



Les anticipations d’inflation semblant désormais plus favorables à une hausse des taux aux US, on peut penser que la probabilité d’une baisse du marché action en anticipation n’est pas à négliger.

Et pour l’Europe, je ne peux pas m’empêcher de constater que les anticipations d’inflation sont significativement meilleurs en Q2 2021 qu’en Q1 2021 (source ici, inspiration du post #901 de la fil du portefeuille de Scipion8) :



Et quand bien même l’Europe ne suivrait pas immédiatement, par l’intermédiaire des taux interbancaires, la hausse des US viendrait contaminer et rehausser les taux en Europe (cf graphique ci-dessous du message #887 de Scipion8 dans sa file).




- En clair, les anticipations d’inflation remontent aux US et en Europe ; c’est bearish actions ;
- Le Buffet Indicator est à son plus haut sur une plage qui anticipe bien les performances à 5 ans ; c’est bearish actions ;
- Les primes de risques des marchés actions sont bien en dessous de leur moyenne ; c’est bearish actions.

Quels sont les arguments qui viendraient contre-carrer ceux-ci et qui pourraient justifier qu’une hausse soit plus probable dans les années à venir ?

Merci d’avance de vos critiques et réflexions, c’est cela que je cherche et qui nourrit mon raisonnement.


Amicalement,
Ursule

Dernière modification par Ursule (31/08/2021 13h32)

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Favoris 2   [+7]    #8 31/08/2021 23h11

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Ursule, 2 points pour nourrir votre réflexion.

1) Sur le ratio valorisation boursière/PIB, celui-ci fait abstraction de la modification considérable de la composition du marché boursier ces 30 dernières années, qui a vu émerger et maintenant dominer des sociétés technologiques à croissance soutenue et très forte rentabilité (sur chiffre d’affaires et sur capitaux). Les capitalisations boursières sont dominées par des sociétés qui alignent des croissances de chiffre d’affaires de 20, 30, 40% par an, tous les ans depuis plus de 10 ans et sans raison que cela s’arrête tant le potentiel est grand, des marges opérationnelles extraordinairement élevées (de 20 à 40% aussi) et des ROE/ROCE indécents.
Comparé à la société cotée typique de la deuxième moitié du XXème siècle, typiquement industrielle ou financière, qui est contente quand la croissance de son chiffre d’affaires dépasse l’inflation, que la croissance de son profit s’approche des 2 chiffres, et sa rentabilité opérationnelle et des capitaux dépasse les 2 chiffres, la valorisation ne peut pas être comparable.
On en a vu un exemple extrême en 2020 : les perdants du covid (restauration, hôtels, services de proximité, malls, industrie du tourisme, automobile dans un premier temps) soit ne sont pas cotés en bourse, soit ne représentaient qu’une part minime de la capitalisation boursière globale, et celle-ci a juste baissé ; les gagnants (numérique dans son ensemble) l’étaient en majorité, et leur valorisation a explosé parce que leur taille et leur rentabilité ont explosé. Pourtant le PIB a reculé de 3.5% aux Etats-Unis, de 4.7% dans l’ensemble des pays développés, de 6.6% dans l’UE et de 3.3% dans le monde.

2) Sur le ratio P/E ; je l’ai écrit pas mal de fois sur ce forum, mais, du fait de l’évolution des normes comptables (comptabilisation des incorporels) et des modes de rémunération (stock-options), qui concernent au premier chef les valorisations les plus élevées (les technologiques) cet indicateur déjà très imparfait ne veut plus rien dire. Je m’étonne d’ailleurs qu’avec votre expérience professionnelle vous le regardiez encore.
Vous avez pléthore de sociétés représentant des centaines de milliards de capitalisation boursière qui ont un P/E proche de l’infini voire négatif, alors que leur P/OCF ou P/FCF est très raisonnable (encore une fois, eu égard à la croissance développée).
Exemple extrême puisqu’ils viennent de publier, Crowdstrike ($64B de capitalisation boursière et bientôt au Nasdaq-100). Résultat comptable négatif, P/E (forward) de -360. Oui mais… la société convertit 40% de son chiffre d’affaires en OCF! De fait, son P/OCF est de 120, ce qui change un peu la donne. C’est bien évidemment monstrueux, mais la société croît de 70% sur le trimestre (en accélération par rapport au trimestre précédent!), et son CA de l’année en cours n’atteindra même pas $1.5B, donc de la croissance il en reste encore pas mal. Et Crowdstrike n’est pas un cas isolé (même si sa rentabilité la place dans le haut du panier), il y en a plein la cote. Comment voulez-vous qu’un P/E de marché veuille dire quoi que ce soit dans ces conditions ?

Dernière modification par corran (31/08/2021 23h18)

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Favoris 1   [+11]    #9 04/09/2021 06h28

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Investisseur super passif ici, je suis le « vieux » qui a du 60/40, avec des fonds/etf monde les plus larges possibles. Franchement, si j’ai vraiment peur, mon nouveau cash va en obligation ou reste en cash tout simplement.  Cependant, je ne fais jamais de truc « techniques ou compliquées » (call, put, bidule truc machin - se sont pour moi des outils pro pour se couvrir, pas pour faire "plus" d’argent) et je ne vends jamais mes actions pour rebalancer puisque pour l’instant j’ai encore des cash-flows via le travail.

Par essence, plein de personnes feront mieux que moi, devraient faire mieux que moi, ont fait mieux que moi…et pourtant, bizarrement, sur + de 25 ans, je ne trouve plus quasiment personne ayant factuellement fait mieux…Dans mes cercles de connaissance, tous ce qui ont fait autre chose ont des histoires de succès incroyables…suivi de pertes qui écrasent le reste ou de petites pertes ici ou là qu’ils ne voient pas, ou un gros souci de benchmark tout simplement. C’est la nature humaine, il faut être chanceux à la sortie et a la rentrée avec des stratégies qui se veulent plus malines que les stratégies concurrentes.

Avec le bull que nous avons eu depuis quelques temps, les « jeunes » me disent que 100% actions c’est mieux (et un simple 100% SP500 écrase mon indice plus large), comme d’autres me disent que les obligations c’est mort, ou que le truc pour se couvrir marche parce que « mettre la superbe explication ici ». Moi, mon allocation a juste augmenté naturellement en actions durant les phases de bull (là je suis plus proche des 2/3-1/3) et diminuée durant les phases de Bear….Je reste sur mes indices mondes et j’accepte donc que certain ferront mieux (par chance pour beaucoup, par choix pour d’autres, mais evidemment, ils penseront souvent que c’est par intelligence)

La réalité, personne ne sait, je garde mon pivot autour de mes 60/40 (dans les 40, un peu d’or et un peu de cash mais c’est anecdotique) …bref, je suis un « boglehead » de base dans l’esprit. Je sais que plein de personne auront des meilleurs résultats, devraient avoir de meilleurs résultats…et pourtant….

Si j’avais vraiment très peur, je passerais a 50% action monde, 50% le reste (obligation, cash…) par petites touches. Mais bon, a 60/40, j’ai déjà l’impression que je suis en mode « dors comme un bébé »…et sur le long terme, il semble que je sois factuellement dans le peloton de tête en terme de résultat, super bizarre quand on y pense. A la prochaine crise, ça sera la même chose, je lirai des histoires de succès et d’intelligence pour s’être bien couvert où avoir vendu au bon moment…et sur une vie d’investissement, pourtant, ce qui a fait leur réussite hier ferra leur misère demain…

Bref, la plupart des postes sont une réflexion sur la véridique histoire de la bourse: cupidité et peur.

PS: au passage, j’ai eu des moments de cupidité sur ce site, notamment avec l’IF - le discours était beau, trop loin de mes "croyances" ceci etant mais l’histoire était si belle, battre le marché en étant concentré avec une marge de sécurité à chaque fois - Un autre moment avec les fonds H20 - 5 minutes seulement, mais quand même, c’est d’ailleurs super intéressant de relire les arguments de celui qui a ouvert le sujet, on retrouve tous les trucs habituels, avec même des messages qui apparaissent équilibrés, prudent, sage - incroyable comment nous n’apprenons jamais rien, absolument à relire avec la fin de l’histoire -
Les cryptos sont pas mal également pour créer de la cupidité. Quand on voit un des derniers messages du genre « nouveau crypto gratuit à miner… », cool, une promesse de gain avec aucun frais et aucun risque – aujourd’hui on vous rase gratis et en plus on vous donne un billet de loterie, dingue, actuellement des personnes arrivent à y croire…même les bonimenteurs sous chapiteaux de mon enfance n’aurait jamais rêvé de ce genre de truc….Bref cupidité avec plein d’autojustification histoire de ne pas perdre la face - les dogbidule sont quand même un bel exemple, avec les même arguments "sérieux" mais en clairement se foutant de votre gu#%@, on arrive au même resutat…hum - autojustification à plein pour expliquer avec moult détails techniques que non, là ce n’est pas pareil parce que…

Se couvrir en cas de chute…pourquoi pas, même si je doute de connaitre quelqu’un capable de réussir ce truc sur 25 ans sans sous-performance - et bon, la aussi, comment prouver que c’etaient des competences et pas juste un survivant au hasard…plus simple de changer son allocation pour gérer sa peur…tout en évitant de vouloir "battre le marché parce que…".

Bref, au prochain crach, on ne change rien et on espère effectivement que le monde survivera….

indices larges + allocation a l’équilibre entre ma peur et cupidité = succès mais avec toujours d’autres qui ont fait mieux, content pour eux…. Mais se croire plus intelligent, c’est un chemin semé d’embuches.

Bonne chance pour vos 20 prochaines années…

Dernière modification par Garfield (04/09/2021 06h42)

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Favoris 18   [+17]    #10 07/01/2022 20h35

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@Gandolfi / Nemesis / Ursule : Effectivement, le DCF donne une bonne grille d’analyse pour comprendre les dynamiques boursières différenciées selon les profils des entreprises.

Perso j’en prends la forme la plus simple - la formule de Gordon-Shapiro - pour simuler différents scénarios et évaluer la sensibilité des différents profils de valeurs.

Gordon-Shapiro : P = E1 / (r-g)
P = prix de l’action, E1 = résultat net (earning) de l’année à venir (en supposant une entière distribution aux actionnaires), r = taux d’actualisation des cash-flows, g = taux de croissance perpétuelle des cash-flows

P/E1 = 1/(r-g) : c’est le PER de l’année N+1

Une action de croissance, c’est une entreprise dont le taux de croissance perpétuelle des profits (g) est plus élevé que le marché.

Une action value, c’est une entreprise dont le multiple de valorisation (ici le PER, c’est-à-dire 1/(r-g)) est plus faible que le marché :
- parce que son risque perçu est élevé (= r élevé)
- et/ou parce que son potentiel de croissance perçu est faible (= g faible)

Je modifie un peu la formule pour ma simulation :
PER = 1/(r-g) = 1/(tsr + erp + srp - pib * m)

où :

le taux d’actualisation des cash-flows r = tsr + erp + srp = taux sans risque + prime de risque du marché actions (equity risk premium) + prime de risque additionnelle de l’entreprise (specific risk premium)

la croissance perpétuelle des cash-flows g = pib * m = croissance structurelle de l’économie * multiple de croissance des cash-flows de l’entreprise (par rapport à l’économie dans son ensemble)

Dans cette simulation avec 5 paramètres :

3 sont des paramètres pour l’économie dans son ensemble :

- le taux sans risque tsr reflète la rémunération attendue d’un placement sans risque sur longue période ; on prend habituellement le rendement souverain à 10 ans comme approximation. tsr est principalement influencé par les anticipations sur la politique monétaire de la banque centrale sur longue période.

- la prime de risque du marché actions erp reflète la perception moyenne du risque actions par les participants de marché. Historiquement aux USA, elle s’établit en moyenne à 4,2% (moyenne 1960-2021 / Damodaran), en évoluant dans un range entre 2% (bulle internet début 2000) et 8% (krach COVID mars 2020).

- la croissance potentielle de l’économie pib reflète le "rythme de croisière" de croissance de l’économie, sans susciter de tensions inflationnistes ou déflationnistes. Elle n’est pas directement observable, on ne peut que l’estimer.

2 sont des paramètres spécifiques aux entreprises :

- la prime de risque additionnelle de l’entreprise srp reflète le risque perçu par le marché (à tort ou raison) sur l’entreprise, au-delà du risque général sur les actions. Ce risque perçu est plus ou moins important selon le secteur d’activité (plus ou moins risqué, disruptable, cyclique etc.) de l’entreprise, la confiance du marché envers le management, la façon de l’entreprise de traiter, plus ou moins bien, ses actionnaires, la transparence de ses comptes, les risques pays / fiscaux / juridiques / réglementaires etc.

- le multiple de croissance des cash-flows de l’entreprise m reflète le potentiel de croissance perçu par le marché (à tort ou à raison) sur l’entreprise.

Appliquons maintenant les 3 paramètres généraux pour les USA : tsr = 1,77% (rendement du Treasury américain à 10 ans), erp = 4,90% (Damodaran), pib = 2,5% (croissance potentielle estimée de l’économie américaine - peut-être un peu optimiste, d’autres diraient 2%).

On voit que pour l’indice (srp = 0%, m = 1), cela fait ressortir le PER (N+1) à 24.

Pour cette simulation, je définis 3 profils d’entreprises :

a) une valeur de croissance, avec srp = 3% (les valeurs de croissance sont typiquement perçues comme plus risquées que la moyenne du marché) et m = 3 (ce qui n’est pas rien : le marché s’attend à ce que les cash-flows de cette entreprise croisse perpétuellement 3x plus vite que l’indice). Son PER ressort à 46.

b) une action value de "type 1" (faible croissance perçue), avec srp = 1% (c’est une valeur mature perçue comme stable, assez peu risquée) et m = 0,5 (ses cash-flows croissent 2x moins vite que ceux du reste de la cote). Son PER ressort à 15,6.

c) une action value de "type 2" (fort risque perçu), avec srp = 2% et m = 1 (elle croît comme l’indice). Son PER ressort à 16,2.

J’applique maintenant différents chocs à l’indice (en jaune dans la table) et à ces 3 entreprises (growth en orange, value de type 1 en vert, value de type 2 en bleu), et j’observe la sensibilité des PER :

Choc 1 : Resserrement monétaire : Le marché anticipe un fort resserrement monétaire pour la décennie à venir, en raison de pressions inflationnistes, conduisant le rendement à 10 ans américain à monter de 1,77% actuellement à 2,50%. Dans ce scénario, l’indice perd 15%, avec des values qui résistent beaucoup mieux (-10%) que les valeurs de croissance (-25%).

Choc 2 : Forte augmentation de l’aversion au risque (exemple : krach COVID de mars 2020) : la prime de risque du marché actions US monte à 7% contre 4,9% actuellement. Dans ce scénario, l’indice perd 33%, là encore avec des values qui résistent mieux (-25%) que les valeurs de croissance (-49%).

Choc 3 : Crise économique structurelle (exemple : krach nippon dans les années 1990) : le marché revoit significativement à la baisse la croissance potentielle de l’économie (NB : cela va bien au-delà d’un simple ralentissement conjoncturel), de 2,5% à 1,5%. Dans ce scénario, les valeurs matures résistent très bien (-7%) alors que les valeurs de croissance s’effondrent (-58%).

Choc 4 : Hausse uniforme des primes de risque spécifiques : les primes de risques additionnelles des 3 entreprises augmentent de 100 points de base. Là encore les value résistent mieux que la valeur de croissance.

Choc 5 : Baisse des primes de risque spécifiques : les primes de risques additionnelles de la valeur de croissance et de l’action value de type 2 (perçue comme risquée) baissent de 100 points de base. On voit la valorisation de la valeur de croissance décoller de +85% : c’est à mon sens le principal moteur de croissance des valeurs de croissance : leur valorisation s’élève au fur et à mesure qu’elles confirment par leurs résultats fondamentaux les espérances des investisseurs.

Choc 6 : Réévaluation de la croissance des flux des entreprises : A l’inverse, si la valeur de croissance déçoit, par ses résultats, les espoirs des investisseurs, ceux-ci revoient à la baisse le potentiel de croissance, avec un effet violent sur les valorisations de ces actions (ici -53% sur la valeur de croissance dont le multiple de croissance perpétuelle m passe de 3 à 2). A contrario, une action value dont le marché a sous-estimé la croissance potentielle (ici le multiple de croissance des cash-flows est révisé de 0,5 à 1) bénéficie d’une réappréciation (ici +24%) de son PER.

Ce que l’on voit actuellement sur les marchés boursiers (sous-performance des valeurs de croissance par rapport aux valeurs matures), c’est à mon sens une combinaison d’un petit choc 1 (le marché a renforcé ses anticipations de hausses de taux de la Fed : il s’attend désormais à ce qu’elle monte ses taux jusqu’à 1,9% à un horizon de 2-3 ans, vs 1,5% il y a quelques semaines), et, pour certaines valeurs portées par des espérances excessives des investisseurs, un choc 6.

Dernière modification par Scipion8 (07/01/2022 20h48)

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Favoris 3   [+6]    #11 08/01/2022 17h11

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@Gandolfi : 1) Les 5 paramètres qui déterminent la valeur intrinsèque d’une entreprise (dans mon modèle DCF simplifié / Gordon-Shapiro) reflètent les perceptions du marché : perceptions sur l’économie globale (le taux sans risque tsr, qui reflète les anticipations du taux de la banque centrale en moyenne sur longue période, la croissance structurelle pib, et la prime de risque du marché actions erp, qui reflète le rendement exigé/attendu par les investisseurs pour compenser le risque qu’ils prennent en détenant des actions) et perceptions sur les entreprises (prime de risque spécifique srp, qui reflète le risque additionnel perçu sur l’entreprise, et potentiel de croissance des cash-flows m).

Le prix de marché reflète la moyenne (pondérée par les flux acheteurs et vendeurs) des anticipations de l’ensemble des participants de marché, mais chaque participant de marché a sa propre estimation de ces 5 paramètres. C’est ce qui permet d’ailleurs l’existence d’un marché : l’acheteur considère (sur la base de ses perceptions) que l’action est sous-évaluée, alors que le vendeur considère qu’elle est surévaluée.

Comme les prix de marché reflètent l’agrégation de perceptions, les chocs peuvent être temporaires ou permanents, avoir un effet de court-terme ou de long-terme. Par exemple :

- Une bulle explose quand les participants de marché revoient significativement à la hausse les primes de risques (erp et srp), qui étaient déconnectées des fondamentaux, i.e. du risque réel sur les cash-flows des entreprises. Cette réappréciation des primes de risque a un effet prolongé, puisqu’il s’agit d’un retour brutal à la "raison". Exemple : explosion de la bulle internet en 2000 : la prime de risque du marché actions US augmente brutalement de 2% à 5% - et depuis elle n’est plus redescendue sous les 4%.

- Une crise économique structurelle a aussi un effet permanent ou de long-terme sur les valorisations boursières, puisqu’elle conduit les participants de marché à réévaluer à la baisse la croissance structurelle de l’économie (pib). Exemple : crise japonaise à partir des années 1990.

- Mais le marché peut aussi se tromper dans sa réévaluation des paramètres, sous l’effet d’un mouvement de panique. Exemple : le krach COVID de février / mars 2020 : la pandémie a évidemment affecté les cash-flows à court-terme de beaucoup d’entreprises, mais (a priori) elle ne remet pas fondamentalement en cause la croissance structurelle de l’économie et le potentiel de croissance bénéficiaire des entreprises, sur le long-terme. Donc l’explosion à la hausse de la prime de risque du marché action (erp), passant de 5% à 8%, n’a été que temporaire (on est revenu autour de 5%). Evidemment c’était une excellente opportunité d’achat pour un investisseur de long-terme.

- Les banques centrales influencent directement le taux sans risque (tsr), de façon plus directe par leur politique monétaire non-conventionnelle (QE et forward guidance) que par leur politique monétaire conventionnelle (taux directeur). Cela leur permet de résorber l’impact des mouvements de panique (hausse des primes de risques erp et srp), et de raccourcir la durée des périodes de panique. Désormais les banques centrales ne se contentent plus de baisser leurs taux directeurs (ce qui fait indirectement baisser les rendements obligataires de long-terme, donc le tsr), mais (i) par le QE elles achètent directement des obligations de long-terme, faisant donc baisser mécaniquement le tsr, et (ii) par la forward guidance, elles s’engagent publiquement à maintenir leur taux directeur à un niveau bas tant que dure la crise, ce qui amplifie l’effet baissier sur les rendements obligataires de long-terme (donc le tsr).

- Dans une crise souveraine et/ou une hyperinflation, le taux sans risque tsr augmente brutalement en raison d’une hausse du risque souverain perçu (craintes sur la soutenabilité de la dette publique) et/ou d’un resserrement monétaire forcé (pour lutter contre l’hyperinflation). Au même moment les primes de risques erp et srp augmentent, et la croissance structurelle pib et la capacité bénéficiaire des entreprises m diminuent. Il en résulte un effondrement des valorisations boursières (par exemple -90% en Grèce en 2007-2012), aussi longtemps que dure la crise économique / budgétaire / monétaire.

2) Les chocs dans la petite simulation dans mon précédent message sont des chocs "simples", où un seul des 5 paramètres de l’équation des PER est impacté. Mais dans la réalité, les chocs sont plus complexes et se traduisent par une réévaluation (plus ou moins prononcée) des 5 paramètres par le marché. Par ailleurs, il faut intégrer non seulement le choc mais aussi l’effet de la réponse des autorités publiques (en premier lieu sur les banques centrales) : l’investisseur ne doit pas simplement réévaluer les primes de risque erp et srp, mais aussi le taux sans risque tsr, qui en général évolue de façon contracyclique sous l’effet des mesures des banques centrales (hors cas de la crise souveraine / hyperinflation).

Et il faut évaluer la persistance relative des chocs sur les différents paramètres. Perso j’ai beaucoup renforcé mon portefeuille lors du krach COVID en mars 2020 parce que je considérais que la hausse des primes de risques était excessive et ne durerait pas (car la pandémie ne change pas les fondamentaux de long-terme des entreprises, hors secteurs particuliers), alors que l’effet contraire de baisse du taux sans risque me semblait plus durable.

3) La petite simulation montre que les valeurs de croissance sont plus sensibles que des actions value (matures ou perçues comme risquées) à des chocs sur les paramètres de valorisation. Cela signifie que l’investisseur sur des valeurs de croissance doit accepter une plus grande volatilité, et par conséquent (i) bien diversifier et (ii) bien maîtriser l’usage du levier.

Avoir un portefeuille fortement orienté croissance expose l’investisseur a une forte volatilité dès que le marché réévalue le risque macro (tsr, erp, pib) et le risque micro (srp, m).

Mais :

- Cette volatilité, si elle est correctement gérée par l’investisseur (= pas de levier excessif, pas de concentration excessive, bonne tolérance psychologique aux fluctuations des valorisations) offre régulièrement des points de renforcement à moindre coût.

- L’investissement en valeurs de croissance fonctionne par résorption graduelle des primes de risque spécifiques : initialement (en phase start-up / licorne), il y a évidemment un énorme risque (très forte prime de risque spécifique srp) ; mais si l’entreprise se développe avec succès et confirme les espérances des investisseurs après chaque publication, alors le potentiel de valorisation par diminution graduelle de la prime de risque spécifique est immense - et les éventuels chocs temporaires sur les paramètres macro (tsr, erp, pib) ne font que causer du bruit et de la volatilité sans remettre en cause la tendance haussière structurelle (cf. la trajectoire boursière de long-terme d’Amazon ou Facebook, par exemple).

4) Perso j’essaie de bien doser mon exposition diversifiée aux valeurs de croissance (ainsi que mon levier) pour que ma tolérance psychologique à la volatilité reste raisonnable. Associer des poches value, rendement, qualité à une poche croissance permet d’atténuer la volatilité du portefeuille.

5) Oui, il y a bien un lien la performance des facteurs (value, croissance, qualité etc) et le cycle monétaire (les cycles de hausse et de baisse du taux directeur de la banque centrale, ainsi désormais que le cycle de constitution et de tapering de son portefeuille de QE).

Un renforcement des anticipations des hausses de taux et/ou de tapering (qui entraîne aussi une hausse du taux sans risque tsr) permet a priori une surperformance des value par rapport au QE (exemple : 2021-2022). Alors que la phase de baisse de taux et de constitution du QE permet a priori une superformance des valeurs de croissance par rapport aux value (exemple : 2020).

Mais il faut bien comprendre que ce sont les révisions des anticipations de hausses/baisses de taux de la banque centrale qui peuvent avoir un effet boursier, et non pas les hausses/baisses de taux elles-mêmes. Si les anticipations ne changent pas, alors a priori il ne doit pas y avoir d’effet sur le taux sans risque, donc sur les valeurs intrinsèques, car les hausses/baisses de taux sont déjà pricées (= reflétées par le tsr).

Par exemple, le marché price actuellement quasiment 200 points de base de hausse de taux par la Fed à un horizon de moyen/long-terme (Eurodollar Futures Quotes - CME Group). Si l’on fait l’hypothèse que ces anticipations sur le marché monétaire/obligataire sont répercutées de façon efficiente par le marché actions*, alors des hausses de taux par la Fed pour 200 bps selon le calendrier attendu par le marché ne devraient avoir aucun effet sur les valorisations boursières. C’est uniquement si le marché anticipait que la Fed allait faire plus que 200 bps de hausses que les actions value devraient surperformer, et moins que 200 bps de hausses que les valeurs de croissance devraient surperformer.

* Cela dit, cette hypothèse d’efficience immédiate des marchés actions est évidemment contestable. On peut aussi légitimement penser que la transmission au marché boursier des anticipations de hausse/baisse de taux de la banque centrale se fait de façon progressive (car ça prend du temps aux investisseurs de réévaluer tous les paramètres). Si c’est le cas, alors les hausses de taux promises par la Fed auraient un effet plus durable sur la surperformance du value vs growth cette année.

Dernière modification par Scipion8 (08/01/2022 17h24)

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Favoris 1   [+7]    #12 13/01/2022 20h32

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vbvaleur, le 09/01/2022 a écrit :

La définition pour vous de ce qu’est une action value prouve que vous n’avez aucune idée de la façon de penser du vrai investisseur dans la valeur.

Mettre les actions dans des cases et les nommer value ou growth sans connaissance, sans analyse au préalable ça me débecte.
Les investisseurs qui se revendiquent dans la valeur comme Warren Buffet, Seth klarman, Munger etc achètent des actions de croissance qu’ils considèrent values comme Apple, Google(Alphabet), Amazon ,Alibaba.

Analyser une action ce n’est pas qu’une question de PER ou de croissance il y’a beaucoup de critères, d’inconnue à calculer et estimer et surtout celui le plus important à prendre en compte c’est le prix.
Je vous enlève pas le fait que vous êtes un bon technicien et pédagogue.
Mais je crois que vous participez en ajoutant votre professionnalisme à la confusion ambiante. (…)

"Je suis ce qu’on appelle un investisseur de valeur, et cela signifie que vous regardez la situation, vous ne regardez pas l’atmosphère, vous ne regardez pas l’esthétique, vous regardez la valeur dure - les actifs de l’entreprise et la trésorerie flux que son entreprise produit - et vous appréciez ces choses, et vous arrivez à quelque chose appelé la valeur intrinsèque , et ensuite vous voyez si vous pouvez l’acheter pour moins cher. Si vous payez la pleine valeur intrinsèque , vous obtiendrez probablement un rendement équitable ; si vous payez plus, vous aurez probablement une expérience infructueuse, mais si vous pouvez l’acheter pour moins que la valeur intrinsèque , vous devriez avoir un rendement supérieur à la moyenne. C’est un investissement axé sur la valeur, et je pense que c’est la forme d’investissement la plus solide sur le plan intellectuel. Howard marques

@Vbvaleur : Quelques clarifications :

1)    L’objet principal de mon message était de montrer quantitativement que des chocs macros (comme une anticipation d’un resserrement de la politique monétaire) peuvent avoir des effets très différents sur les valorisations, selon qu’il s’agisse de valeurs de croissance ou de valeurs moins bien valorisées (pour une raison ou une autre). Pas vraiment de rouvrir le débat éternel de ce qu’est le style value, qui fait déjà l’objet d’autres files.

2)    Cela dit : définir des actions value sur la base de ratios de valorisation plus faibles que la moyenne du marché, c’est l’approche la plus standard.

Par exemple les ETF factoriels value regroupent des actions faiblement valorisées (par rapport au reste de la cote), sur la base de ratios divers : par exemple ici, le P/B, le PER forward and le dividend yield.

Un gérant value comme William Higgons (le meilleur en France ?) applique une approche value quantitative, basée sur le ratio P/CFO (auquel il associe d’autres ratios comme le ROIC et la marge d’exploitation).

3)    Je comprends que pour votre part vous ne vous reconnaissez pas dans cette approche value quantitative diversifiée, et que vous définissez vos cibles selon la différence entre la valeur de marché (définie par une masse aveugle de participants de marché supposés stupides) et la valeur intrinsèque que vous estimez – de façon personnelle et « artistique ».

Je suis bien d’accord pour dire qu’identifier des opportunités value sur la base d’un seul ratio (en particulier le PER) est très limité et conduit probablement à un mauvais stock-picking. Il semble que combiner différents ratios (P/B, VE/EBITDA, PER etc.) permette d’améliorer la qualité du stock-picking. Chacun aura ses préférences personnelles sur la question. Effectivement, s’il y avait une recette magique, ça se saurait.

En revanche, je ne vois pas pourquoi l’estimation de la valeur intrinsèque par un investisseur lambda (ou pro, peu importe) aurait plus de valeur que celle d’un autre. Pour moi, le prix de marché n’est pas le résultat des humeurs d’une foule stupide – c’est au contraire le résultat de la confrontation d’estimations divergentes de la valeur intrinsèque entre des participants de marché intéressés (puisqu’ils ont du « skin in the game »).

Vous pouvez bien avoir votre idée personnelle sur la valeur intrinsèque de Discovery : jusqu’à preuve du contraire, c’est une opinion personnelle (certes sourcée), certainement pas une vérité établie. Et si le prix de marché de Discovery est ce qu’il est aujourd’hui, c’est que d’autres investisseurs n’ont pas la même opinion que vous. Et c’est la confrontation incessante de ces opinions variées sur la valeur intrinsèque de Discovery qui conduit à son prix de marché.

Je trouve qu’il y a souvent chez les investisseurs value une illusion et une présomption : l’illusion de se croire « à part » du reste du marché, comme si le marché était une machine stupide et non pas l’agrégation de participants de marché humains, éventuellement intelligents, et motivés par l’opportunité du gain et la crainte de la perte ; la présomption de se croire supérieur à cette foule.

4)    Le désavantage de votre définition personnelle du style value (qui ne vous est pas exclusive, je le sais bien), c’est qu’elle est tautologique : si le style value c’est d’investir dans des actions qui valent fondamentalement plus que ce qu’elles cotent, alors tout le monde (ou presque) pratique l’investissement « dans la valeur ».

Vous pensez sérieusement que j’achète des actions sans penser qu’elles vont s’apprécier ? C’est bien parce que je pense qu’elles vaudront plus demain qu’aujourd’hui, grâce à leurs fondamentaux, que je les achète. Je suis donc un investisseur dans la valeur qui s’ignore 😉

Même chose bien sûr pour l’écrasante majorité des investisseurs. La seule exception, éventuellement, ce serait ceux qui pratiquent la spéculation pure, qui jouent uniquement sur le momentum sans jamais regarder les fondamentaux, et espèrent simplement que l’enthousiasme de la foule portera demain plus haut des cours déconnectés des fondamentaux. Ce genre de spéculation existe, mais elle est très minoritaire, il suffit de parcourir les files de portefeuilles sur ce forum.

5)    La valeur intrinsèque d’un actif, c’est la somme actualisée de ses flux futurs. Pas de ses flux passés. Donc investir c’est toujours un pari sur l’avenir.

Cette idée que l’investisseur value serait propriétaire exclusif de l’objectivité et de la sagesse, parce qu’il se focalise sur des éléments tangibles, sur les résultats passés, sur la valeur des actifs « solides », me semble autant fausse que ridicule.

D’abord les résultats passés sont déjà dans les cours, hors inefficience énorme du marché (éventuellement sur des nano caps, et encore).

Ensuite, un actif vaut ce que valent ses flux futurs. La valeur intrinsèque d’une vache laitière, c’est la somme actualisée de ses flux laitiers futurs (et de la viande, en fin de parcours), moins les coûts d’entretien – on se fiche éperdument des flux passés, qui ne servent éventuellement qu’à donner un ordre d’idée sur la capacité de production future de la vache.

Cela vaut pour tous les actifs des entreprises – des immeubles, des terrains, des brevets etc. Donc cette idée qu’il faut se focaliser sur les actifs tangibles pour valoriser une entreprise sans faire de « prédictions » sur le futur est absolument fausse. Quand on valorise un actif, on fait un pari sur l’utilité future de cet actif.

Donc un investisseur value, qui se croit sage parce qu’il ne fait pas de « prévision » contrairement à un amateur de valeurs de croissance, se trompe quand il pense cela. Les 2 font un pari sur l’avenir, simplement sur des profils différents d’entreprises.

6)    Cela dit, chacun fait bien ce qu’il veut. En matière d’argent, je crois en la vertu du pragmatisme le plus absolu. Seuls les résultats (sur longue durée) comptent (en ajustant du risque si on veut faire des comparaisons). L’objectif est pour chacun de trouver un mode de gestion qui corresponde bien à sa compréhension et à sa psychologie, c’est bien là l’essentiel.

Dernière modification par Scipion8 (13/01/2022 20h44)

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Favoris 3   [+11]    #13 23/01/2022 02h05

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@Geoges / Peakykarl : Je respecte toutes les opinions (notamment celles de ceux qui ont plus d’expérience que moi), mais je suis évidemment en complet désaccord avec la vision de Jeremy Grantham :

1) Au sens le plus conventionnel (DCF), il n’y a pas de bulle boursière aujourd’hui : à mon sens, une bulle se définit par une prime de risque du marché actions anormalement basse. C’était le cas au pic de la bulle internet début 2000 : la prime de risque du marché actions US était à 2%, contre une moyenne de long-terme de 4,2% (Damodaran).

En fin d’année 2021, la prime de risque estimée par Damodaran était à 4,9%. Avec la correction en cours, on doit être actuellement autour de 5,3%. C’est-à-dire que le risque actions est bien mieux rémunéré aujourd’hui qu’en moyenne sur les 60 dernières années. Il est difficile dès lors pour moi de parler de "bulle" dans ce contexte.

Cela ne signifie pas que les marchés boursiers ne puissent pas violemment corriger : en 2007, avant le début d’une crise financière très meurtrière en bourse, la prime de risque du marché actions US était à 4%, soit quasiment en ligne avec la moyenne de long-terme - ça n’a pas empêché une baisse de 50% sur le S&P500 - mais il y avait un déclencheur très important, une accumulation très excessive de risques dans le système financier mondial (dont les subprimes n’étaient que la pointe émergée de l’iceberg).

Si l’on voulait me convaincre de l’imminence d’un krach boursier, il faudrait me démontrer (a) soit une sous-estimation anormale du risque sur les actions (= une prime de risque du marché actions anormalement basse, i.e. le cas de 2000 - ce qui n’est pas le cas), (b) soit une accumulation massive de risques dans un segment clef du système (le système financier, les Etats etc., i.e. le cas de 2007) - mais J. Grantham ne le fait pas.

2) Si je regarde calmement les résultats publiés et attendus des grandes entreprises - en particulier les leaders technologiques - je n’ai pas du tout l’impression d’une bulle. Au contraire, après la correction récente, les valorisations me semblent attractives comparé à la moyenne des dernières années. Cette observation rejoint la précédente, plus générale, sur le fait que la prime de risque du marchés actions US est désormais nettement supérieure à sa moyenne de long-terme.

Note : Le PEG n’est une mesure pertinente que pour des entreprises ayant atteint un niveau suffisant de maturité. Donc celui de Tesla est à prendre des pincettes – car il est peu probable que la croissance annuelle du chiffre d’affaires de +45% prévue sur 2020-2023 soit soutenable.

Que les PER sur toutes ces belles entreprises en croissance puissent encore baisser de quelques unités, c’est évidemment tout à fait possible. Mais qu’ils puissent s’effondrer, comme le laisse entendre Grantham, sans déclencheur particulier et alors que ces entreprises gagnent de plus en plus d’argent chaque trimestre, me semble peu probable.

3) En revanche, je crois que ces dernières années ont vu la prolifération (sur fond de QE massifs) de micro bulles locales, qui ont explosé (actions cannabis, Beyond Meat, SPAC), ont commencé à se dégonfler (actions « vertes », meme stocks, cryptos) ou devraient bientôt le faire (Tesla et véhicules électriques, plus généralement), dans un contexte moins porteur (remontée des taux de la Fed).

A mon sens le fait même que ces bulles locales explosent les unes après les autres dément justement la thèse d’un marché boursier en bulle généralisée. C’est au contraire le signe d’un fonctionnement plutôt sain du marché boursier.

4) J’ai du mal à comprendre vers quels actifs devraient se tourner les investisseurs actions pour limiter leur exposition au marché boursier supposément en « bulle » selon Grantham :
- les rendements obligataires souverains et corporate investment grade sont très bas après des années de taux zéro et de QE par les grandes banques centrales – au point que ceux qui parlent de « bulle obligataire » (dont Grantham lui-même) me semblent plus convaincants que ceux qui dénoncent une bulle boursière ;
- les marchés immobiliers dans les pays que je connais (France et USA) me semblent davantage survalorisés que les marchés boursiers…
- les multiples de valorisation du private equity dépassent ceux de la bourse
- les matières premières sont un marché étroit et improductif sur le long-terme, donc pas une alternative crédible aux actions

Cela dit, je reconnais que cet argument du type « TINA » (there is no alternative) n’a pas empêché des éclatements de bulles dans le passé.

5) Quand on regarde l’évolution du bilan financier du monde depuis 20 ans, on constate un enrichissement considérable – qui est plutôt moins marqué aux USA que dans le reste du monde. C’est la conclusion surprenante à laquelle aboutit cette étude très intéressante de McKinsey.

L’étude montre que la proportion entre (a) actifs financiers détenus par le système financier, (b) actifs financiers détenus par les ménages, les entreprises et les Etats, et (c) actifs réels, reste remarquablement stable depuis 20 ans, en 3 tiers :


En termes de multiple du PIB mondial, la richesse mondiale nette s’établit à 6 fois le PIB mondial, un ratio qui a augmenté de 50% depuis 50 ans.

Cette augmentation importante peut éventuellement appuyer la thèse de la « super bulle » de Grantham – mais quand on regarde les patrimoines nationaux nets, il apparaît que la richesse nationale américaine (a) a moins augmenté depuis 20 ans que la plupart des autres pays et (b) est moins élevée, en termes de multiple du PIB national (4,3), que le reste du monde. (Je sais que ça peut paraître contre-intuitif, mais il faut garder à l’esprit que les flux d’investissements internationaux vers les marchés actions, obligataires et immobiliers américains ont beaucoup augmenté depuis 20 ans – i.e. l’appréciation de ces actifs américains bénéficie de plus en plus à des investisseurs étrangers.) Cela n’est peut-être pas compatible avec la thèse de Grantham.

6) Se réjouir d’une correction boursière trahit souvent une mauvaise stratégie d’investissement et des jugements erronés dans le passé récent. Grantham prédit l’explosion imminente d’une bulle boursière depuis des lustres – ceux qui l’ont écouté ont perdu beaucoup d’argent ces dernières années. Je pense qu’il en résulte une amertume qui peut conduire à un gros biais de perception.

Je porte beaucoup plus d’attention à l’avis d’un Warren Buffett, qui regarde calmement les fondamentaux des entreprises, et considère les corrections boursières non pas comme l’opportunité de « se venger » d’erreurs de jugement passées, mais comme des opportunités de renforcer à meilleur coût ses positions sur des entreprises de qualité. C’est évidemment l’approche que j’essaie de suivre actuellement – ce qui m’a conduit à faire des renforcements importants ces derniers jours, notamment sur Berkshire Hathaway et Amazon, et je prévois de continuer en ce sens si la respiration de marché se poursuit.

7) L’analyse de Grantham n’est pas très claire sur l’inflation, mais il semble que ce soit un paramètre important dans son modèle. C’est à mon sens une erreur profonde de considérer l’inflation courante (par essence très volatile) comme un déterminant important des valorisations intrinsèques. Ce qui compte davantage, pour la politique monétaire, donc pour le taux sans risque et donc pour les valorisations intrinsèques des entreprises, c’est l’ancrage des anticipations d’inflation autour de la cible de la banque centrale.

En l’occurrence, pour la première fois depuis un an la mesure préférée de la Fed pour les anticipations d’inflation de long-terme, l’inflation anticipée à 5 ans dans 5 ans, est repassée sous la cible de la Fed (2%), à 1,98% actuellement. La Fed a communiqué clairement sur la remontée à venir de ses taux, qui est désormais largement pricée. Donc à mon sens, l’inflation est un non-sujet aujourd’hui pour les valorisations intrinsèques, malgré tout le bruit médiatique sur le sujet.

8) Le fait que Grantham juge la pertinence de la politique monétaire de la Fed sur la base de l’existence supposée d’une "bulle" manifeste une profonde incompréhension de la monnaie. L’objectif de la politique monétaire c’est de maintenir une monnaie stable (donc sans déflation ni hyper-inflation), afin de servir au mieux l’économie réelle. Ce n’est pas de soutenir les marchés boursiers, de créer des bulles, ni de les empêcher.

Une bulle boursière (et son éclatement) est essentiellement un jeu à sommes nulles auquel participe une fraction réduite de la population - les bourgeois. Que le bourgeois Paul gagne au détriment du bourgeois Pierre est une considération extrêmement secondaire par rapport à l’importance de la mission de la banque centrale - assurer la stabilité de la monnaie pour tous les citoyens. On ne mène pas plus la politique monétaire que la politique d’un pays "à la corbeille", comme le disait De Gaulle. Que Grantham semble le penser manifeste une perte de contact avec la réalité et/ou une incompréhension économique, à mon avis.

Donc globalement je suis serein et je vois la correction en cours comme une bonne opportunité de renforcer à moindre coût mes valeurs de qualité en portefeuille.

Dernière modification par Scipion8 (23/01/2022 02h25)

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Favoris 3   [+9]    #14 03/02/2022 14h24

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@Concerto / IH : A mon sens il faut clairement distinguer :

1) les perspectives macroéconomiques, qui influent sur la politique monétaire, donc sur le taux sans risque (qui reflète les anticipations de long-terme sur la politique monétaire)

2) le risque spécifique aux actions, qui est rémunéré plus ou moins bien, ce que reflète la prime de risque du marché actions

Chacun aura sa propre opinion sur les 2 sujets, et doit se positionner en conséquence :

1) Actuellement le taux sans risque aux USA (le rendement obligataire souverain à 10 ans) est à 1,80% - très loin des 4% promis par IH. L’un des principaux déterminants de ce taux, ce sont les anticipations d’inflation de long-terme, qui aujourd’hui restent remarquablement ancrées à la cible d’inflation de la Fed (les anticipations d’inflation à 5 ans dans 5 ans, la mesure favorite de la Fed, sont actuellement à 2,03%).

Il y a une incertitude sur la "destination" du cycle de hausses de taux de la Fed :

- actuellement le marché (en moyenne) pense qu’à la fin de ce cycle de hausses de taux, le taux directeur de la Fed s’établira à 2%

- les membres du FOMC (en moyenne) pensent qu’à la fin de ce cycle de hausses de taux, le taux directeur de la Fed s’établira à 2,5%

- si l’on pense, comme IH, que la Fed devra monter son taux directeur jusqu’à 4%, alors il vaut mieux éviter de surpondérer les valeurs de croissance et leur préférer des valeurs matures, voire old school, ce que son portefeuille reflète effectivement

- si l’on pense que les banques centrales ne vont pas pouvoir empêcher une hausse "permanente" de l’inflation bien au-delà de leur cible, alors il faut acheter des protections contre l’inflation, comme l’or ou des obligations indexées sur l’inflation

- perso je suis globalement d’accord avec le marché et la Fed sur la destination du cycle de hausses de taux (en tout cas je n’ai pas de raison particulière de dévier fortement de ce qu’ils anticipent). Si l’on pense comme le marché alors l’allocation logique c’est une allocation de type indiciel (via des ETF) ou quasi-indiciel (via un portefeuille très diversifié, comme le mien)

- cela dit, perso je reste convaincu que l’on reste dans un monde fondamentalement déflationniste (pour des raisons démographiques, technologiques, politiques/géopolitiques, de nature séculaire), donc je pense qu’après ce cycle de hausses de taux il y aura un risque déflationniste persistant qui exercera une pression constante sur les taux directeurs des banques centrales et les empêchera de réduire leurs bilans jusqu’à une situation pré-QE. Cette conviction justifie chez moi une surpondération des valeurs de croissance (car dans un monde déflationniste la croissance est rare, donc elle se paie cher).

2) Actuellement la prime de risque du marché actions US (estimée par Damodaran) est à 5,17%, soit un niveau nettement plus élevé que sa moyenne de long-terme (4,2% entre 1960 et 2021). Sur cette période elle a évolué entre 2% (avant l’explosion de la bulle internet en 2000) et 8% (au creux du krach COVID en mars 2020 - un niveau que nous ne reverrons peut-être jamais plus de notre vivant, et une opportunité unique que beaucoup ont manqué par esprit grégaire - mais pas moi).

La prime de risque du marché actions reflète la rémunération du risque spécifique aux actions. C’est à mes yeux le meilleur indicateur pour évaluer le niveau de surévaluation ou sous-évaluation des actions, indépendamment du contexte macroéconomique.

Une prime de risque du marché actions de 5,17% ne donne pas d’indication particulière sur l’orientation à court-terme du marché actions : ça peut partir dans un sens comme dans l’autre. Ce qu’on peut dire avec certitude en revanche, c’est qu’il vaut mieux acheter un panier actions rémunéré à 5,2% qu’à 4% comme il y a un an.

Là encore chacun aura sa stratégie, selon notamment son horizon d’investissement. C’est clair que si l’on est focalisé sur la performance à court-terme, la prime de risque du marché actions n’a que peu d’utilité. Perso je résiste bien à la volatilité sur mon portefeuille, et ma perspective est celle d’un investisseur de long-terme. De ce point de vue, je considère que 5,2% est un niveau intéressant pour continuer à renforcer mon portefeuille. A 5,5% (comme il y a quelques jours) ou 6%, je renforcerais de façon plus agressive.

@Concerto : Oui, le QE a été sans doute un facteur important de soutien aux marchés actions ces dernières années (en exerçant une pression baissière sur le taux sans risque). Et oui, ce facteur de soutien va s’atténuer peu à peu. Cela signifie que les marchés boursiers auront moins "le vent dans le dos", voire un peu de vent de face avec les hausses de taux et le tapering de la Fed.

Mais :

a) Il y a une forte incertitude sur l’ampleur de la réduction des bilans des banques centrales. Peu de gens, à mon sens, pensent que la Fed et la BCE pourront revenir à leur taille de bilan pré-QE. Perso je ne le pense pas du tout, parce que je pense que le risque déflationniste a une nature structurelle. Si vous vous souvenez, à l’automne 2018, la Fed avait lancé un premier tapering de son portefeuille de QE (d’ailleurs il y avait eu aussi une correction boursière), mais elle avait dû le ralentir et lancer des opérations sur le marché monétaire, pour des raisons liées au fonctionnement du marché monétaire. (C’est très technique - en gros, disons que le marché monétaire et le système financier "s’habituent" à la liquidité surabondante résultant d’une longue période de QE ; réduire trop rapidement cette liquidité via le tapering peut susciter des problèmes de fonctionnement du marché monétaire, voire des risques pour la stabilité financière. Evidemment la Fed regarde cela de très près et en tiendra compte, à mon sens, dans le rythme du tapering.)

b) Sur le long-terme, ce n’est pas l’environnement monétaire (fluctuant) qui détermine la performance boursière des entreprises ; ce sont leurs fondamentaux. Pour un investisseur de long-terme, je pense que c’est une perte de temps de trop se focaliser sur la conjoncture macroéconomique, par nature fluctuante et difficilement prévisible (même si je le fais moi-même par déformation professionnelle). Ce qui va déterminer la valeur de mes entreprises en portefeuille dans 20 ou 30 ans (mon horizon d’investissement), ce n’est pas le nombre de hausses de taux de la Fed cette année, ni le rythme de son tapering - ce sera l’évolution des fondamentaux de ces entreprises.

Donc pour un investisseur de long-terme, les fluctuations du taux sans risque liées aux anticipations changeantes du marché sur la politique monétaire, et celles de la prime de risque du marché actions, offrent simplement des opportunités de renforcer à moindre coût des valeurs de qualité.

Certes, cette année boursière sur fond de politique monétaire moins accommodante risque d’être compliquée (il faut s’habituer à ne plus avoir le vent dans le dos), mais si l’on n’accepte pas cette volatilité, alors la solution logique est de ne pas investir en bourse. La performance supérieure des actions sur le long-terme (par rapport aux autres classes d’actifs) est justement la rémunération de cette volatilité. Vouloir la performance sans accepter le risque n’est pas logique à mes yeux. Chacun doit adapter son allocation patrimoniale sur la bourse à sa tolérance au risque.

@Doubletrouble : Ce qui permet à la BNS d’acheter massivement des actifs étrangers, c’est la force du franc suisse. Elle ne s’appuie pas sur "du vent", mais sur la force de l’économie suisse et la qualité de sa gouvernance, notamment monétaire. Les pays qui ont une gouvernance saine, un environnement démocratique stable, sont récompensés par une monnaie forte, reconnue internationalement. (Et alors, si l’environnement monétaire le justifie comme c’est le cas actuellement en Suisse, ils peuvent acheter massivement des actifs étrangers sans compromettre la solidité de leur devise… ce que ne peuvent se permettre durablement les dictatures, sauf à disposer de réserves inépuisables de ressources naturelles.)

Perso je trouve ça très sain. La richesse est promise aux calmes, aux industrieux, aux pacifiques. La ruine récompense les belliqueux, les paresseux, les corrompus. Je trouve que notre monde serait beaucoup plus sûr et sain si tous les pays du monde avaient la qualité de gouvernance et la stabilité politique de la Suisse.

Sur l’action de la BNS, je confirme ce que dit Stouf - même si je m’y intéresse aussi, par déformation professionnelle et parce que les actions de banque centrale se comportent comme une classe d’actifs "à part", décorrélée à la fois des marchés actions et des obligations souveraines. (Je ne suis pas encore actionnaire de la BNS, mais je suis actionnaire de la Banque Nationale de Belgique.)

Dernière modification par Scipion8 (03/02/2022 16h10)

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Favoris 8   [+7]    #15 14/04/2022 08h06

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@ Garfield :c’est ce que je cherche à faire aussi depuis peu grâce aux Etf Lifestrategy de Vanguard.

Les connaissez-vous ?

Ils existent en C et D avec plusieurs modèles actions/obligations : 20/80, 40/60, 60/40, et 80/20.

À titre d’exemple j’utilise celui-ci : ETF LifeStrategy | Vanguard France professionnel

On ne peut pas faire plus simple !

Bonne journée à tous

Déontologie : je détiens une position acheteuse/vendeuse sur une ou plusieurs société(s) listée(s) dans ce message.

Dernière modification par JulienIH (14/04/2022 08h07)

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[+17]    #16 23/04/2022 11h34

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Le procès d’arrogance que certains font ici à Scipion est le même que celui que l’on fait à Emmanuel Macron face à Marine le Pen.
"tu tututu mais vous mélangez tout!"

Le problème est que lorsqu’une personne est factuellement plus intelligente qu’une autre, c’est dur de rester au même niveau de médiocrité.

Il fut un temps où le peuple acceptait cela: avoir une élite plus intelligente.
Aujourd’hui n’importe qui veut que son avis (aussi bête ou erroné soit-il) ait autant de valeur que celui d’un sachant: c’est la nouvelle démocratie, l’égalité d’intelligence… et c’est le retour à la loi de la jungle, celle du plus fort où l’intelligence était moins valorisée que la force et la violence.

Je trouve aussi Macron arrogant et j’aurais volontiers vu un(e) autre comme président. Mais je ne vais pas simplement parce que je n’ai pas les mêmes capacités intellectuelles chercher à l’abattre ou abattre Scipion pour me complaire dans ma médiocrité avec mes camarades de même pensée (voir ce qu’est devenu le parti républicain en Amérique avec Trump).

Quoi que vous fassiez ou disiez, vous ne reverrez pas Scipion sur ce forum car nous ne le méritons pas (et il est suffisamment intelligent pour s’en être rendu compte, malgré tous ses efforts pendant 2 ans pour relever le niveau, illustrés par sa réputation). Alors lâchez vous comme le fait notre hôte, vous n’avez rien à craindre, la curée est ouverte!

Ce forum a grand besoin de se recentrer sur l’investissement comme vous le dites Yg75.


Le train de la vie ne s'arrête jamais deux fois à la même gare.

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[+15]    #17 25/05/2022 18h01

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Cette discussion devient une suite de jérémiades (par ex anti-élites, ou liste de catastrophes à venir) qui s’éloigne largement de la vision, de la mission et des valeurs décrites dans notre charte (à un point qui me fait me demander si les dérives que dénonçait scipion9 sur ce forum n’ont pas une grosse part de vérité).

Merci de
   - vous recentrer sur la "thématique de l’investissement patrimonial (actions, immobiliers, obligations, non coté…) pour atteindre l’indépendance financière ou générer un complément de revenu".
   - refaire de ce forum un "lieu convivial, positif, d’échange, de partage, de réflexions sur l’investissement patrimonial et de contribuer positivement à l’élévation des connaissances de chacun sur cette thématique".
   - éviter les messages qui ne comportent pas un apport concret (et directement lié au sujet traité par la discussion), assurant "un certain niveau de qualité des échanges et notamment des opinions argumentées, factuelles, étayées ou des questions précises et circonstanciées".


J'écris comme "membre" du forum, sauf mention contraire. (parrain Fortuneo: 12356125)

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[+9]    #18 15/06/2022 16h45

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Bonjour,

La fin de l’euro,  la fin du monde, la fin des haricots..

Nous sommes entrés dans une ère eschatologique où tout événement, nouvelle, information nous plongé dans l’univers angoissant de la fin du.monde.

Comme je l’avais lu à la fin des années 90, nous sommes passés d’un "marketing de l’envie " à un "marketing de la peur "

Le bug de l’an 2000, le calendrier maya, le réchauffement climatique, le covid ( et sa petite sœur la variole du singe), maintenant le krach boursier et la hausse des taux….sans oublier la troisième guerre mondiale !

Demain la grippe de la tomate, la disparition du bitcoin, l’effondrement de l’immobilier, les hémorroïdes de Macron et quoi encore?

Avec un CAC à 6000 points, on est encore loin du méga krach.
Et personne ne connait l’avenir.
Cessez donc de vous pencher sans cesse sur les problèmes et regardez plutôt les opportunités.

Mafo

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Favoris 13   [+15]    #19 23/06/2022 17h49

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Bonjour à tous,

Suite à un message intéressant de Lopazz sur la file de son portefeuille (lien ici), et dans la mesure où son approche semble proche de celle décrite dans ma présentation (lien ici), j’ai backtesté la stratégie suivante : investir dans UPRO (un ETF S&P500 x3 daily) en prenant le pari que le S&P retrouvera ses plus hauts plus ou moins rapidement.

Ce produit n’existant que depuis 2009 (c’est à dire en phase de hausse), il m’a fallu reconstituer un historique en le compilant/calculant moi-même, et ce depuis 1928 (historique disponible sur une source publique - Yahoo). Il s’agit donc d’un indice composite dividendes réinvestis auquel j’ai ajouté des frais de 0,95%.

La comparaison entre le composite et le vrai produit étant concluante, j’ai poursuivi l’analyse :



Toutes les précautions sont à prendre avec cet exercice théorique mais il me semble néanmoins instructif.

Voici les principaux éléments :



Le graphique ci-dessus représente la performance totale sur une durée de 10 ans à partir de la date en abscisse. Par exemple, un investissement dans le S&P 500 en 1948 aurait rapporté environ 170% contre environ 1000% pour notre indice composite.

En performance annualisée, voici ce que cela représente :



Autrement dit, l’exemple ci-dessus aurait produit une performance d’environ 11% par an sur 10 ans pour le S&P contre 35% par an pour notre S&P x3 composite (sur la base UPRO).

Ce que l’on constate, c’est que la performance d’un S&P x3 pulvérise celle du S&P avec un risque de perte naturellement plus important sur la même période. Pour faire simple, un évènement type 1929 aurait rayé de la carte un portefeuille constitué uniquement de ce produit, mais des situations plus courantes de Bull markets sont extrêmement rentables. Par ailleurs, à part en 1929, il ne semble pas que les pertes puissent dépasser 60% du portefeuille.

C’est d’ailleurs là que ce trade peut-être intéressant : le risque est très asymétrique. Pour une perte de 100%, on peut également obtenir plus de 5000% grâce au phénomène de slippage des ETF multiplicateurs (explication simple d’Evariste sur la file de Lopazz en ce qui concerne le slippage ici).

Evariste a écrit :

Si l’indice perd 50% en une journée, alors l’ETF x2 va perdre 100% ou presque, mais pas si l’ETF perd 50% sur plusieurs jours, même si c’est une perte continue, car chaque jour le levier x2 est réinitialisé, en l’occurence à une somme plus petite, et pas à la somme de départ.

A noter, et beaucoup de monde l’oublie, que cet effet joue aussi dans l’autre sens ! Si l’ETF prend 10% une journée, puis 10% le deuxième jour, il aura gagné, 21%, alors que l’ETF x2 aura gagné 44% environ, ce qui est supérieur à 2x21=42%.

C’est ce qui permet à un ETF leveragé de faire des très très gros leviers quand l’indice monte continument, bien supérieurs au levier pourtant affiché.

Pour illustrer ce propos, voici l’effet de levier sur une période de 10 ans en fonction de la date d’investissement initiale :



Pour un investissement de 10’000 euros, voici les gains potentiels sur 10 ans en fonction de la date d’investissement :



Au vu des gains potentiels incroyables, il est intéressant de d’observer la probabilité de perte et celle de gain. Autrement dit, la probabilité de perte ou de gain rapportée au gain ou à la perte elle-même. On ne voudrait pas risquer beaucoup pour gagner peu. C’est ce que le graphique ci-dessous représente :



Ici par exemple, il y a 10% de chances de gagner 2’500 euros avec notre investissement initial de 10’000 euros avec le S&P. On observe que la probabilité de perte avec le S&P est inférieure à celle de l’indice composite, mais que le potentiel de gain du composite est très élevé en comparaison. On peut donc penser qu’investir dans UPRO peut être opportun puisque le S&P a déjà souffert d’une perte de plus de 20% depuis ses plus hauts, en misant sur un retour à ses plus hauts.

C’est donc ce que j’ai calculé ici :



Ce tableau représente les max drawdowns de plus de 20% depuis 1928. La date de début, celle du max drawdown et celle du retour à l’ancien plus haut sur le S&P 500, avec les délais entre ces périodes ("start to min" représente le nombre de jours entre le plus haut et le plus bas, et "start to end" entre le plus haut et le retour au plus haut). Il montre aussi les valeurs au plus haut et au plus bas avec le max drawdown en % (donc la chute la plus forte depuis l’ancien plus haut).

La colonne "reaching…" indique la date à laquelle le drawdown a atteint les -20%. Autrement dit, c’est l’équivalent à l’époque de la situation dans laquelle nous nous trouvons plus ou moins aujourd’hui, c’est à dire que l’on peut se demander si c’est le moment d’investir au vu de la chute déjà importante du S&P 500.

La colonne S&P est la réponse à cette question pour chaque drawdown du tableau : par exemple en ayant investi dans le S&P le 8 juin 1962, c’est à dire la date à laquelle le marché atteint les -20% versus les anciens plus hauts (techniquement, c’est la veille mais cela ne change pas grand chose), le S&P aurait produit une performance de 83% sur 10 ans. Le composite, lui, aurait produit une performance de 307%(!).

En fait, cette technique aurait été profitable dans 9 cas sur 10 pour le S&P (tout le temps sauf en 1929) et dans 7 cas sur 10 pour le composite. Ce dernier produit parfois un gain de plus de 1500%, largement de quoi essuyer les pertes des mauvaises tentatives me semble-t-il.

En conclusion, pour les profils avertis avec une bonne tolérance au risque de perte en capital important, il semble que mettre une ligne sur ce support puisse offrir un retour sur investissement intéressant. Qu’en pensez-vous ? Je suis intéressé par vos retours et suggestions.

---------------------------------------------------

Pour finir, je réplique ici ce que j’ai posté sur ma file personnelle :

Ursule a écrit :

Accessoirement, pour tenir les comptes comme le fait régulièrement IH pour remettre les pendules à l’heure, et parce que c’est un satisfecit très appréciable, il semble que mon analyse sur un S&P fortement survalorisé en août de cette année sur ce forum était correcte (ici, ici, ici,  et ). On peut toujours mettre cela sur le dos de la chance, mais il me semble que j’avais vu juste néanmoins, et ce malgré l’argument un peu habituel du « personne ne sait faire de market timing ». J’en profite pour ré-affirmer que, sans même compter ce market timing que l’on peut peut-être imputer à la chance, beaucoup de traders font du market timing avec des éléments tangibles et avec succès. Ceux que l’on voit (et qui échouent pour l’écrasante majorité) sont les gérants de fonds, dont le métier principal est d’attirer des capitaux, pas de gagner de l’argent pour leurs associés. C’est notamment pour cela qu’on a l’impression que personne ne fait mieux.

Par soucis de transparence, je dispose de positions longues sur un ETF S&P 500.

Amicalement,
Ursule

Déontologie : je détiens une position acheteuse/vendeuse sur une ou plusieurs société(s) listée(s) dans ce message.

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[+9]    #20 06/07/2022 13h58

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@AchL L’existence des marchés financiers sert à enrichir des banques, des gérants, des traders, ceux qui ont toutes les rues du Monopoly comme vous dites. Rien de nouveau.
Le tout si on met le pied là-dedans, est d’arriver à en profiter comme eux. En janvier ils étaient sur les plateaux télé à dire aux particuliers d’investir car il n’y avait "pas d’alternative". 20 % plus bas ce sont les mêmes qui viennent vous dire de rester prudent (comme au printemps 2020 d’ailleurs). Faire comme eux (le contraire de ce qu’ils disent), se servir de la volatilité plutôt que jouer une hypothétique tendance long terme, est peut-être un bon début.

Côté pénurie, je vais manquer de mirabelles cette année à cause du gel tardif, mais je m’en fous, il me reste plein de conserves à la cave. Les framboises et pommes envoient du lourd en contrepartie.
Les voisins laissent tranquillement pourrir leur récolte sur les arbres et achètent de la pizza industrielle à + 10 %.
ça sert à quoi, la moutarde de Dijon, quand je trouve des herbes aromatiques gratuites partout où je regarde ?
Pour ce qui est du prix de l’essence, quand je vois ce que les gens en font : 1 A/R de 5km tous les matins consistant à déplacer 2 tonnes de ferraille pour récupérer une baguette de 200g, et autant pour emmener 40kg de précieuse progéniture à l’école pour que celle-ci ne s’évite surtout pas un futur cancer en faisant un peu de vélo.

Réflexions un peu décalées j’avoue, juste pour illustrer que cette affaire de pénurie est surfaite (du moins dans nos pays où l’on ne meurt pas de faim). Que le consommateur arrête de se ruer sur n’importe quoi à n’importe quel prix et la "pénurie" sera vite dégonflée, avec pour conséquence une récession qui est en train d’être intégrée dans les cours. Je ne comprends même pas cette ruée vers les vacances dès l’école terminée : tout le monde au même moment en direction des mêmes endroits (y compris des plages moches), dans des avions/TGV blindés/chers/en grève ou dans des embouteillages à 2€/l, puis dans des hôtels/restaurants à + 20 % ou pire. Dans notre "enfer", on a pourtant tous des coins de nature et des richesses patrimoniales à portée de vélo, où qu’on soit dans le pays.


« Celui qui croit en une croissance exponentielle dans un monde fini est fou, ou économiste. »

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Favoris 1   [+8]    #21 29/08/2022 16h17

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pariswilfried a écrit :

Ririsama, le 26/08/2022 a écrit :

J’étais tombé il y a quelques jours sur une carte de l’Europe avec les prix de l’électricité en Europe :
https://www.investisseurs-heureux.fr/up … 172511.jpg

Sachant que sur la dernière décennie, nous étions sur une moyenne de 20-30 EUR/MWh, inutile de dire que la crise énergétique est réelle et immense.

Je ne comprends pas comment est fixé le prix de l’énergie en Europe. Je croyais que c’était uniformisé par un organisme de l’UE, raison pour laquelle malgré nos centrales nucléaires nous subissions la hausse de plein fouet.
Mais quand je vois la carte, je ne m’explique pas les différences énormes (de 1 à 4) entre pays de l’UE… sachant que la France fait partie des pays les plus impactés par la hausse. Pourtant nous avons une dépendance bien moindre que les Allemands vis à vis du gaz russe.
Je sais que nous avons en ce moment de nombreux réacteurs à l’arrêt pour maintenance (dont des soucis de corrosion mais qui paraissent anodins à Loic le Floch Prigent qui connait bien le secteur) et que cette difficulté est temporaire.

Le réseau européen est interconnecté pour permettre à chaque pays d’importer/exporter si besoin (dans la limite des capacités) mais il n’y a pas de prix unique européen.

Cela va dépendre du mix énergétique de chaque pays, de sa production / consommation et des interconnexions avec les autres pays européens.

Les prix spot pour un pays sont fixés par le coût marginal de la dernière centrale à produire pour répondre à la demande d’électricité, sachant que les producteurs sont appelés dans l’ordre du plus faible au plus haut coût marginal.

Vous avez donc en premier les ENR (coût marginal faible ou nul), puis les centrales nucléaires et enfin les centrales au fioul / charbon / gaz qui sont appelées (sachant que ces dernieres ont aussi un coût supplémentaire lié au droit d’émettre du CO2).

Et comme le prix des énergies fossiles sont en fortes hausses (notamment le gaz), le prix spot de l’électricité s’envole.

Avec son parc nucléaire en difficulté, la France se met à faire tourner les centrales à gaz et surtout à importer d’Allemagne/Belgique/UK de l’électricité (chère).

Exemple en comparant aujourd’hui à l’année dernière pour la France :

A gauche, aujourd’hui, imports significatifs (pas d’export), 65% nucléaire, 12% gaz.
A droite, 30 août 2021, larges exports (pas d’import), 81% nucléaire, 1% gaz.

(j’ai pris aujourd’hui pour les données ci-dessus mais la tendance identique dès qu’on compare les situations avant / après mise à l’arrêt des réacteurs nucléaires)

Les chiffres sont disponibles sur le site de la RTE

Dernière modification par Ririsama (29/08/2022 17h25)


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[+12]    #22 12/09/2022 08h45

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@Naelyan : Vous ne comprenez pas mon point de vue car vous vous placez systématiquement dans le contexte d’une opposition binaire, sans considérer une troisième voie (diplomatique, par exemple). J’ai été assez clair sur mon positionnement : je me préoccupe dans l’ordre de ma ville, de ma région, de mon pays, et en grand dernier, franchement très vaguement, de l’Europe. Je me contrefiche donc de la presse russe, chinoise, de ce qui se passe en Ukraine ou en Syrie, de la moustache de Poutine, à partir du moment où les intérêts stratégiques de la France ne sont pas menacés.

Devoir abandonner la sécurité de nos mines d’uranium du Niger à des mercenaires russes (tout le monde ici semble l’avoir oublié) par exemple me paraît bien plus grave que tout ce qui pourrait se passer en Ukraine :
Mali : les mercenaires de Wagner se paient avec les mines d?or, selon le général de Barkhane

Vous m’expliquez avec patience ce qu’est une sanction, en imaginant un ordre mondial qui obéisse à des Lois, alors qu’en géopolitique c’est toujours la loi du plus fort qui prévaut. Sans rentrer dans le débat de la pertinence de se mêler de ce conflit, le rapport de force énergétique n’est clairement pas en notre faveur et les sanctions prises sont au mieux quichottesques et au pire suicidaires. Le blocus continental de Napoléon était plus réaliste que ce que nous sommes en train de faire. Mon opinion, c’est qu’il aurait mieux valu en rester au niveau des sanctions financières, au moins nous avons l’avantage sur ce terrain et cela nous rapporterait un butin appréciable.

Quoiqu’il en soit, la preuve éclatante qu’on ne peut pas utiliser le concept d’état de droit au niveau mondial c’est que toutes ces sanctions ont été systématiquement contournées par les différents états : nous continuons d’acheter du gaz russe (oui, même aujourd’hui, simplement pas par le gazoduc Nord Stream), ils continuent d’en vendre, l’argent continue de rentrer et sortir de Russie, tout ça juste de manière plus tortueuse qu’avant. Ce sont les petites gens qui paient l’addition de ce mauvais théâtre, comme ce sont eux qui paient de leur vie les jeux de pouvoir des puissants sur le champs de bataille.

Vous avez le droit de trouver cela admirable, je trouve cela déplorable, c’est là que nous avons des points de vue probablement irréconciliables.

Rassurez-vous toutefois, je vais cesser de jouer les Cassandres dans cette file. Comme le dit @Jef56, je suis fou, et je m’en voudrais de gâcher les quelques semaines d’innocence qui nous séparent encore de l’hiver.

Amusez-vous bien.

Déontologie : Je détiens des positions me permettant de souffrir le moins possible/bénéficier le plus possible des éventualités déplaisantes auxquelles fait allusion ce message.

Dernière modification par doubletrouble (12/09/2022 10h28)


✯ Mangia bene, caca forte, e non aver paura della morte.

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Favoris 2   [+7]    #23 15/09/2022 13h37

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haddock a écrit :

Mais sans aller jusqu’à s’exposer à des titres obligataires de ces pays ou le risque est très important, notamment sur la Turquie, il me semble que les bons du trésor US commencent à présenter un certain attrait. Je suis convaincu que la FED monte fortement ses taux et peut être plus que nécessaire, pour avoir la possibilité, en cas de récession majeure, de pouvoir se dégager des marges de manœuvres pour pouvoir intervenir et réajuster sa politique. Dans ce cas de figure, si on a des taux US à 4.5/5 d’ici quelques mois et qu’on a des indicateurs qui montrent une stabilisation voire une baisse des prix, on aurait une bonne opportunité sur cet actif, sans avoir besoin de se risquer dans des zones instables et fragiles.

Cela serait même la suite logique d’une fin de cycle économique assez classique, idée que j’avais exposé précédemment dans mon message #7921.

Si je reprends quelques éléments :
- chômage : on est toujours très bas mais cela commence à frémir


- inflation : on semble entrer dans la phase plateau/descendante


- commodities : idem


- taux :  ça grimpe, je ne refais pas mon post précédent

Si on suit le playbook classique, on a passé la phase "long sur matières premières" et on rentre dans la phase "le cash est roi" (cash is king)
La prochaine phase serait effectivement "long sur les obligations", mais tout est dans le timing (et si c’était facile, ça se saurait).

On voit très bien dernièrement que la FED est encore complètement dans une politique de resserrement et que l’horizon de la fin de la hausse / pivot est difficile à cerner.

Donc tant qu’on est dans ce schéma, les obligations continuent d’en prendre plein la tête.
C’est d’ailleurs la pire année pour les obligations depuis 1990 si on regarde l’index agrégé Bloomberg :

Cela doit grincer des dents chez les amateurs du 60/40 (bonds/actions) cette année…

Le grand jeu pour essayer de timer le moment parfait pour rentrer sur les treasuries :
- Historiquement, dans des phases de hausses de taux, la FED n’a jamais arrêté tant que les Fed funds étaient inférieurs au dernier CPI YoY (elle les a même historiquement toujours tenus quelques temps au-dessus avant de pivoter) :

- Pour l’instant, on a des Fed funds à 2,5%, un CPI YoY à 8,3%, donc un Fed funds réel à -5,8%, autant dire qu’il y a de la marge…
- Il est possible de faire des projections de l’inflation et de croiser avec les fed funds futures pour estimer le pivot, mais c’est très délicat étant donné les incertitudes sur les CPI MoM à venir…

Pour ce que ça vaut, avec des CPI MoM à 0% et les Fed funds futures actuels, on ne croise pas avant Q2 2023!

Dernière modification par Ririsama (15/09/2022 14h03)


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Favoris 2   [+8]    #24 02/10/2022 12h41

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Nous avons beaucoup parlé d’énergie avec malheureusement peu de faits.

Les deux problèmes se situent au niveau du Gaz et de l’Electricité.

Électricité :

Contexte Un double contexte affecte les prix : l’alignement des prix de l’électricité sur ceux du gaz (Le prix étant déterminé par le dernier moyen de production appelé), et le non investissement dans des centrales électriques pilotables et l’indisponibilité du nucléaire Français.

Court-Terme Le problème va porter sur cet hiver et fortement dépendre de la météo. A date pour Septembre, Octobre et Novembre Météo France estimait la probabilité 50% plus chaud que les normales de saison, 30% conforme et 20% plus frais. Les prix vont vraisemblablement rester élevé sur les marchés. Ce que nous pouvons craindre le plus ce sont des "délestages tournant" -> Lors du pic de consommation 18h-21h, le coupage localisé de certains consommateurs particuliers. C’est un retour en arrière pénible mais rien de dramatique économiquement. Nous assumons nos errements sur le nucléaire et l’idiotie de la fermeture de Fessenheim.

Moyen-Long Terme A MT, les difficultés du nucléaire devraient se résorber et les marchés se désaligner uniquement du gaz (+ effet prix du gaz, voir ci-dessous). En revanche, le non-investissement dans des capacités pilotables va affecter durablement les prix. L’arrivée du "nouveau" nucléaire étant bien trop tardive. Nous payons l’effet politique des verts sur François Hollande et Emmanuel Macron : 3 victimes : le climat, les particuliers et les entreprises.

Gaz

C’est le sujet dont nous parlons le plus. Le gaz se transporte mieux que l’électricité mais moins bien que sur le pétrole.

Moyen-Long Terme

A LT, le prix du gaz n’a pas vocation à être fondamentalement différent d’une région à une autre (Comme le pétrole, somme toute). L’offre va au plus offrant. Ce qui change le prix c’est la possibilité de se fournir par pipeline (Moins coûteux sur une courte distance) par rapport à la possibilité de se fournir par méthanier (Plus coûteux). L’Europe ne va pas avoir durablement du gaz plus cher que le Japon ou la Chine qui se fournissent également par Méthaniers. Les US seront plus compétitifs grâce à un transport du gaz plus faible mais l’avantage compétitif induit est certes important mais pas exorbitant contrairement à ce que sont les prix à CT. Des contrats avantageux (Type celui de l’Allemagne avec la Russie) peuvent également légèrement influer. Dire donc que l’Europe va s’effondrer à Long-Terme suite à la guerre / aux difficultés sur NS1&2 est inexacte.

Court Terme

A court-terme en revanche, les prix peuvent fluctuer d’une région à une autre entre ceux qui se fournissent en pipeline et ceux qui se fournissent autrement.

Sur l’offre : Faute de capacité de condensation/liquéfaction + transport les producteurs ne peuvent aisément vendre leur gaz au plus offrant et doivent se contenter des capacités existantes (Et des contrats actifs).

Sur la demande : Faute de terminaux, il n’est pas forcément possible d’acheter toute la quantité de gaz souhaitée sur une région donnée.

L’un de ces deux aspects entraîne une variation des prix selon les modes de transports.

Actuellement, l’offre est contrainte (Faute de capacités de méthaniers et de capacité de transformation) et localement la demande l’est également faute de capacités en terminaux (Europe). Les prix divergent donc selon les modes de transports.

Où en sommes nous aujourd’hui ? Sur ce topic revenaient fréquemment des messages alarmistes sur cet hiver. Allons nous passer l’hiver ? (Spoiler : Oui).

Au niveau des réserves déjà :
France (97,04% de taux de remplissage soit 29,9% de la consommation annuelle)
Allemagne (91,48% de taux de remplissage soit 24,80% de la consommation annuelle)
EU (88,44% de taux de remplissage soit 26,09% de la consommation annuelle)

Ensuite la consommation est en train de baisser : Au niveau des industriels du fait des prix mais également au niveau des particuliers par conviction mais plus pragmatiquement du fait des prix. A ce propos, avoir protégé les prix en France est aussi idiot que contre-productif.

Au niveau des prix, le taux de remplissage commence à affecter les prix. Sur le TTF (référence européenne) Novembre par exemple, après un pic à 350 le 26 août, nous étions vendredi à 189. Alors même que le moteur de la hausse (Fermeture de NS 1) n’a pas été résolu et s’est au contraire durabilisé.



Au niveau Français les prix sont sensiblement plus faibles



Le pic d’août était à 219€, le prix de vendredi était à 68€. Le prix avant les tensions était plutôt autour de 30€ et la montée avait ensuite commencé fin 2021, bien avant l’invasion.

Conclusion :
L’Europe va t-elle souffrir économiquement du gaz à CT : Oui. A MT/LT, oui également mais la perte de compétitivité en comparaison des autres pays devrait être faible (US) voir très très limitée (Asie).

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[+13]    #25 27/03/2023 18h33

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Bonjour à tous,

Pour rester dans le sujet de cette file, je souhaite partager avec vous un projet sur lequel j’ai travaillé. Sur les conseils de lopazz, dans sa file que je recommande vivement (dernier post ici), je me suis intéressé à un indicateur fourni par le site Sentimentrader ; le "smart-dumb" (graphique ci-dessous).



La courbe noire représente le S&P500 (SPX), la courbe bleue représente la "smart money" et la courbe rouge la "dumb money" (explications plus bas dans mon message).

Cet indicateur est disponible contre un abonnement payant sur le site, et est décrit de cette manière par ses créateurs (l’explication est plus longue, je n’ai collé que les premiers paragraphes) :

SentimenTrader a écrit :

Construction:

The Smart Money Confidence and Dumb Money Confidence indices are a unique innovation that allows subscribers to see, in one quick glance, what the "good" market timers are doing with their money compared to what "bad" market timers are doing.

Our Confidence indices use mostly real-money gauges - there are few opinions involved here. Generally, we want to follow the Smart Money traders when they reach an extreme - we want to bet on a market rally when they are confident of rising prices, and we want to be short (or in cash) when they are expecting a market decline. The higher the confidence number, the more aggressively we should be looking for higher prices.

Examples of some Smart Money indicators include the OEX put/call and open interest ratios, commercial hedger positions in the equity index futures, and the current relationship between stocks and bonds.

Pour résumer en Français, il s’agit de séparer le comportement de la "smart money", c’est à dire les "bons" market timers de celui de la "dumb money", les "mauvais" market timers. La méthodologie est volontairement vague puisque cette entreprise vit de la vente d’abonnements donnant accès à des indicateurs. Je suis toujours sceptique quant à ce type d’indicateur puisque par définition, un indicateur n’est pas le fruit d’une science dure, et qu’il est trop souvent vendu comme un remède miracle (j’avais posté ici au sujet de la moyenne mobile notamment, que je considérais comme un indicateur non-concluant). Par ailleurs, l’entreprise qui le construit a tout intérêt à le faire apparaitre comme le Graal puisque ses revenus en sont en partie tirés.

J’ai donc voulu backtester l’indicateur Smart/Dumb depuis début 1998 jusqu’à ce jour pour en tirer sa capacité de prédiction. Autrement dit, j’ai voulu savoir ce que cet indicateur "indiquait", s’il était crédible, et s’il s’agissait d’un indicateur court terme ou long terme. Voici comment j’ai procédé ainsi que mes conclusions :

1. J’ai récupéré les données depuis le site grâce à l’offre de bienvenue (un mois gratuit) et tracé un graphique pour avoir une représentation visuelle du marché vs la "smart money". En voici un extrait depuis 2015 (les données remontent jusqu’à 1998 mais il est difficile de distinguer quelque chose sur un graphique si condensé).



2. J’ai, pour chaque séance depuis 1998, calculé la performance à 20, 30, 50, 60, 70, 80, 90, 120, 150, 180, 210, 240, 270, 300, 330 et 360 jours et classé ces performances par catégorie (<-10%, entre -5 et -10%, entre 0 et -5%, entre 0 et 3%, entre 3 et 10% et >10%). Cela me permet de connaitre la valeur "hasard" du marché. Autrement dit, c’est la probabilité d’obtenir une performance donnée à une échéance donnée si j’avais investi au hasard. Cette étape est indispensable puisque dans un marché fortement haussier, la probabilité de faire un gain est plus forte que celle de faire une perte. Un indicateur qui vous recommanderait de passer à l’achat et aurait raison à 55% pourrait en fait très bien faire moins bien que le hasard si la probabilité de faire un gain en investissant à n’importe quel moment était de 60%. Pourtant, cet indicateur vous serait venu comme étant miraculeux alors que dans la pratique, il fait près de 10% moins bien que le hasard…



3. Ma valeur hasard étant maintenant définie, j’ai choisi arbitrairement une valeur de la courbe "Smart money" que je voulais tester en tant que signal d’achat. Autrement dit lorsque la valeur de la courbe "Smart money" atteint X, je considère qu’il s’agit d’un signal d’achat. L’indicateur étant actuellement assez haut par rapport à son historique, j’ai pris la valeur de la dernière séance, soit 0.74. La question est donc "Quelle est la répartition des résultats réalisés en ayant acheté à chaque fois que l’indicateur a franchi la valeur 0.74 à la hausse depuis 1998 ?".

Voici les résultats chiffrés et graphiques :





On constate que la smart money est plus souvent dans le vrai que dans le faux (deux tiers dans le vrai, un tier dans le faux) dans ses anticipations (il y a eu 42 signaux d’achats depuis 1998 à la valeur 0.74). On constate aussi que plus on regarde loin dans le futur du signal d’achat, plus les performances sont "extrêmes", c’est à dire au dessus ou en dessous de +10% et -10%, ce qui semble logique puisque le marché a plus le temps de bouger.

4. Maintenant que nous avons la valeur hasard et la valeur de l’indicateur, nous pouvons comparer les deux pour juger l’indicateur :



Le tableau ci-dessus est un peu piégeux, voici une clé de lecture pour l’interpréter : "La probabilité empirique (= basée sur l’historique) que la performance à 20 jours après un signal d’achat soit entre -5% et 0% est de 0.83x celle du hasard". Ce tableau ne définit donc pas votre probabilité de gagner ou perdre, mais la probabilité de tomber sur une performance donnée à une échéance donnée par rapport au hasard.

En d’autres termes, sur les 42 occurrences de signal d’achat depuis 1998 :
- les valeurs en rouge indiquent les performances que l’indicateur "évite" plus souvent que le hasard.
- les valeurs en vert clair indiquent les performances que l’indicateur "attrape" jusqu’à 2x plus souvent que le hasard.
- les valeurs en vert foncé indiquent les performances que l’indicateur "attrape" plus de 2x plus souvent que le hasard.

Quelques conclusions que l’on peut en tirer (si le passé est un indicateur fiable du futur, ce qui est discutable, à fortiori selon l’AMF) :
- On remarque que sur les 42 occurrences d’un signal d’achat (arbitrairement défini à 0.74 pour la valeur de "smart money") depuis 1998, cet indicateur a des performances meilleures que le marché à échéance 20 à 30 jours mais qu’il est moins bon que le hasard ou assez proche du hasard au delà.
- On remarque également qu’il est 3 à 8x plus performant que le hasard pour attraper des performances supérieures à +10% entre 20 et 80 jours mais aussi 4.5x plus performant pour attraper les performances en dessous de -10% à 20 jours.
- Cet indicateur semble donner ses meilleures performances à 30 jours (71% de performances positives vs 62% pour le hasard) ;
- Malgré un signal d’achat lancé ce jour par l’indicateur, cela ne m’empêche pas, à titre personnel, d’être bear à plus long terme. Je vous encourage vivement à aller faire un tour sur la file de Louis Pirson qui effectue un travail remarquable de compilation d’indicateurs en tous genres sur sa file (lien vers son dernier message ici).

Avertissements :
- Encore une fois, selon l’AMF, le passé n’est pas un bon indicateur fiable pour déterminer le passé ;
- Un indicateur ne doit être pris qu’en temps qu’indicateur et pas en tant que science dure. Il ne reflète que ce que le passé a produit et peut à tout moment changer de comportement pour réaliser une performance médiocre ;
- Il existe une probabilité que l’indicateur ne soit qu’une conséquence d’autres éléments qui sont réunis la plupart du temps mais qui ne le sont pas cette fois. Auquel cas l’indicateur n’indique pas, il corrèle.
- Cet indicateur semble surpondérer les performances extrêmes, c’est à dire qu’il augmente la volatilité de la performance en comparaison au hasard, en positif comme en négatif ;
- Tenter de "timer le marché" (= essayer d’acheter au plus bas et vendre au plus haut) est majoritairement contre productif pour les épargnants et il est recommandé de ne pas le faire sans une bonne connaissance des risques de perte en capital et de ses propres limites (matérielles et psychologiques).
- Je ne suis pas payé/employé par le site SentimenTrader ou quiconque travaillant pour ce site pour parler de l’indicateur en question ;
- A ma connaissance, je ne suis en lien avec aucune personne travaillant pour ce site ou en relation avec ce site.


A vous lire,

Amicalement,
Ursule

Dernière modification par Ursule (27/03/2023 18h38)

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